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JadeWeb
chroniques #12
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LES
ENTRETIENS
. Clinic .
. Piano magic .
. Bip-Hop .
. Travaux Publics .
. Mathieu Malon .
. Arbouse Rec .
À LA LOUPE
Label
Z
& Zoé
V/VM
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IMITATION
ELECTRIC PIANO Trinity neon
(Duophonic/Chronowax)
Duophonic figure en compagnie de quelques autres labels (Wurlitzer
Jukebox, Too Pure) un grand bol d’oxygène pour qui sait apprécier
les mélodies aériennes des artistes qu’ils éditent.
C’est tout naturellement que son rangement s’impose dans les parties supérieures
de nos étagères de disques, toujours plus près du
ciel bleu.
Vaine utilité que de chercher chez IEP des solos de guitares écorchés
,des samples contendant ou des rythmiques violentes... tout dans ce jardin
musical est arrondi, ronds, doux au toucher. Les galets plutôt que
la roche, l’eau davantage que le feu. Ce petit collectif de….10 personnes
met en pratique les évangiles de Saint Robert Wyatt avec un esprit
d’à propos et une simplicité d’approche toujours renouvelée.
On rebondit avec douceur sur leurs petites constructions naïves,
fleurant ici les Haïkus japonais (King’evil) là la comptine
Irlandaise, le développement progressif ou le gracieux aparté
madrigal et lunaire…. Une démonstration qui n’est jamais aussi
savoureuse que lorsqu’elle dure… pour un moment d’épanouissement
et de profonde quiétude. Quelque part entre Hélium, Moonshake,
Long Fin Killie et Stereolab....
JJ.
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SNAWKLOR
It could have lived here
(Synaesthesia/Chronowax)
Môriatopie, Nubie, Doonham, Hyperboréa, Vondervotteimittiss,
autant de lieux imaginaires, autant de créations humaines issues
de l’esprit inventif d’écrivains. Alberto Manguel, dans sa quête
de recensement de ses localités de l’esprit, n’a pas encore pu
cartographier Snawklor.
Aucun plan, aucune carte n’y mène... puisque ce lieu est tapi dans
le cerveau de deux musiciens : D. Krasevac et N. Gray, compositeurs
de cet album it could have lived here dont la capitale est
Snawklor.
Une musique en plusieurs actes, comme autant de quartiers visités,
comme autant d’invitations au voyage. Des pièces environnementales,
bâties autour d’une attente électroacoustique, pour des harmonies
utopiques, qui se créent, se construisent et se déconstruisent
sous nos oreilles. Cette collection d’ambiances tantôt angoissantes,
tantôt murées de mystère, quelquefois allègres
voire exotiques semblent intervenir dans les soubassements d’une cité
où les bruits des canalisations, la prospection des cavités
laissent, entrevoir, au détour d’une voie des cathédrales
de lumière scintillante. Entre Francisco Lopez et Sogar. Très
apaisant !
JJ.
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FRED
POULET Hollywood baby
(Dernière bande/ Wagram)
L’amérique a construit un mythe de son ultime Mohican, il serait
à présent temps pour la france de faire son devoir de mémoire
et d’honorer, ce qui à bien considérer, pourrait être
le dernier de ses branleurs. Un branleur de talent, certes, mais un branleur
tout de même, qui a apprécié la vie comme elle venait,
avec son cortège d’expériences, de rencontres absconses,
drôles , merveilleuses, surprenantes. Un parcours atypique qui le
mène durant ses années de silence, de la peinture à
la réalisation de BO de film X ou de chroniques sportives pour
revue psychanalytique (?).
Du bricolage élaboré et revendiqué de ses premiers
albums, les manches se sont depuis retroussées, la production affinée.
Une montée en régime qui pour autant ne fait pas flancher
la candeur idiote de ses textes, l’humour pince sans rire de ses jeux
de mots, l’imagerie décalée de ses figures de style.
La musique, elle, passe du poids coq au poids moyen et si la production
s’est étoffée, c’est aussi pour accueillir et harmoniser
les nouveaux genres ( Jazz, Trip-hop, rock…) qui s’accrochent à
l’écriture du Poulet. Des musiciens de tout univers : Sébastien
Martel (vercoquin avec thierry Stemler), Sarah Murcia (contrebasse pour
Magic Malik O., Caroline, Las Ondas Marteles, Gil Coronado (Mercoledi,
musicien pour Marc Ducret, Aka Moon, Daunick Lazro, Barre Phillips (albums
sur For4 Ears), Benoit Delbecq, etc…) et franck Vaillant (Batteur d’Arthur
H, entre autres) composent la garde rapprochée de musiciens, à
laquelle viennent s’adjoindre Alice Botté, Mami Chan, et David
Husser (Production).
Hollywood baby, ou la vie en cinémascope du dernier des romantiques.
JJ.
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V/a
ID WET ID02
(Idwet/La Baleine)
Pas
moins de 10 artistes différents gravitent autour de la planète
Idwet le temps de cette compilation.10 formes d’expression unique, 10
tournures différentes de la musicalité contemporaine.
Une
petite famille domiciliée aux abords de Caen, autour de collectifs
graphiques et sonores : Purée Noire, Collectif 17 ans d’Angers
, de Tours via l’excellent label Travaux Publics et bien sur à
Rennes et Nantes avec Peter I’m Flying, Effervescence et Idwet.
Robert
le Magnifique oscillant entre complainte folk déviante et breakbeats
jazzy ronds et molletonnés dans un sans faute parfait ; Massimo
Gambini, quant à lui fait le grand écart entre Chokebore
et une électro pop kitch que n’aurait pas renié A certain
Ratio ou Fisherspooner. L’Italien est toujours aussi souple.
EDA
produit pour sa part une musique envoûtante teintée d’échos
moyen-orientaux (Sombre) comme du Bryan Jones (Muslimgauze) joué
sous l’eau ou des élans d’Abstract hip-hop abrasif bien foutu (Le
futur). Le Président Chirac, toujours aussi tapé balance
un Stupid Body et un Discodrama calé entre Buckfunk
3000, l’écurie Def Jux et l’électronica bohème de
chez Morr. Très bon.
Monogram
continue à entêter nos esprits de ses petites sonorités
pop-électronica planantes et éthérées ( album
chez Peter I’m Flying) ; Abstract Keal Agram prolonge un peu du bonheur
qu’on a eu à écouter Clusterville avec ce AC
échappé un temps de l’album sorti chez Goom.
Amnésie
et Atone, tout deux membres d’ analog & digital sound [r] (ainsi que
du collectif 17 ans) s’écartent chacun de leurs fondamentaux pour
livrer un break-hop corrosif teinté de musique industrieuse (Amnésie)
lignée Dave Clark bourré, alors qu’Atone revisite avec Lexvoluxs
le fond de commerce de Morr ou City Center Office façon Styrofoam
–Isan. Vlan aussi d’ailleurs. Tepr offre un inédit avec son un
bâtiment d’après guerre entre arctique et drum’n
bass vaporeuse.
Princesse
Rotative s’initie aux joies d’un Hip-hop crasseux et bien balancé
façon Patric Catani ou Req. Twedi, enfin, composé des deux
fondateurs d’Idwet (qui ne font donc pas que tenir les chiffres et perdre
de l’argent ;-) ) clot ce disque de la manière la plus somptueuse
qui soit (mais pouvait-il en aller autrement ?), avec une introspection
Freudienne et Lali punienne. Trop de talents sur trop peu de place.
JJ.
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RENIER
LERICOLAIS Reader’s digest
(Optical Sound/Limonade)
Sous
cet anagramme ludique (en est-ce un ?) se devine le trait d’esprit
d’un garçon qui transpose avec beaucoup de savoir faire et d’humilité,
les techniques des cadavres exquis surréalistes et le cut-up Burroughsien
à sa pop folk laptop électronica évanescente. Reconnaître
la petite part de folie qui habite les morceaux de Renier Lericolais,
c’est admettre la diversité qui héberge l’âme et l’esprit
créatif de tout un chacun . C’est s’avouer à soi-même
qu’un compositeur peu creuser un genre ad vitam ou peut au contraire explorer
la musique dans la diversité de ses aspirations et de ses envies.
De Satie à Gonzales, de Ramuntcho Matta à Moondog en passant
par l’écurie Rephlex…Une sorte de O. lamm en plus décomplexé,
un Hypo assagi.
Un
reader’s digest bien nommé, assez mélancolique par moment
( 6) qui doit s’interpréter comme un maelström parfois
un peu incohérent, mais généreux d’un jeune homme
moderne qui dresse des ponts entre les genres sans inhibitions. (Un lecteur
d’Octopuss ?!)
JJ.
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MINIFER
away from keyboard
(Current/Limonade)
Mehdi Hercberg, professeur d’art appliqué au civil s’est fait
connaître en appliquant son art.
Organisateur éclairé de soirées transversales (Shobo-Shobo)
fruits de maturations exigeantes entre culture japonaise et savoir-faire
français.
Minifer apparaît comme un apatride territorial et musical, un heimatlos,
un sans-papiers du rythme et des frontières, pourrait-on dire,
n’ayant su se résoudre à sacrifier l’un au profit de l’autre,
à faire du non-choix un choix, préférant creuser
et extraire dans le meilleur des deux cultures.
Ce non-choix donne au final une musique tissée de mélodies
abstraites et de rythmes cahotants , qui puise sa force dans cette ambiguïté.
Les anicroches du rythme, leur contingent de mesures et de cadences se
mettent progressivement au diapason de la mélodie. Entre sobre
gravité et virulente candeur.. la musique de Minifer a un côté
ludique et cynique autant que fragmenté qu’on retrouve chez Irritant
rec ou V/Vm. Aquatique, les sons d’Abite passent au scanner l’activité
nocturne d’une ville, le spectre d’une radio.
Pas de réelle cohérence dans la trame narrative de l’album
mais davantage des flashs et des échos, des clins d’œils comme
les passages furtifs du faisceau d’un phare, plus enclin à orienter
qu’à arraisonner.
A retenir les narcoleptiques Slomo, trk, amberson proches de l’ambiant
musique de Steve Hillage, à l’orée de la musique environnementale
(Global), les divagations numériques (Flajo), les
accidents de limaille de fer (casals2) les jolies symphonies mineures
tels que flc, ou les comptines pour enfant peu sage (castle
quest IV) .Agréable et attachant.
JJ.
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A.
DONTIGNY / DIANE LABROSSE
Télépathie
(No Type/Métamkine)
Certains lecteurs de cette chronique n’étaient encore qu’à
l’état de leur conception lorsque Diane Labrosse exaltait
déjà (début 1980) avec énergie sa musique
au sein de groupes féminins talentueux (Wonder Brass, Justine).
Quelques années plus tard, on la retrouve négociant son
talent avec génie en compagnie des marchands du temple de chez
Tzadik (Ikue Mori, Martin Tétreeault, Zeena Parkins). Vingt-cinq
ans de proses musicales / combat, vingt-cinq ans d’une intraitable fougue
de création pour venir jusqu’à nous sous la forme de ce
duo, orchestré en compagnie de A. Dontigny (membre de Napalm
Jazz et Morceaux de machines) pour un traité autour des perturbations
électroniques et des effluves atmosphériques. Un ordinateur,
un échantillonneur et voilà nos deux Canadiens disposés
à refaire le monde à la mesure de leurs attentes et de leur
talent.
Un mille-feuille atmosphérique composé de nappes pesantes
d’ambiant dark et d’entrelacs d’effets anesthésiants et où
se superposent dans un croustillement auditif jouissif une floraison de
glitchs abstraits, de disjonctions de strates mélodiques, de flux
en inhalation, d’aspérités et de fractures numériques
entraînantes.
Une télépathie qui développe à bien des égards
l’idée d’empathie entre les musiciens et avec le public tant chacun
semble anticiper les réactions de l’autre, pressentir les mouvements
et inclinaisons qu’ils souhaitent donner à leurs climats spectraux.
Quand la musique devient un langage universel qui se suffit à elle-même
sans avoir recours aux mots. Profond et exigeant.
www.media.electrocd.com
JJ.
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A
TRIBUTE TO PAVEMENT Everything
is ending here
(Homesleep records/Limonade)
On serait bien en peine de comptabiliser le nombre de larmes versées,
le nombre de soleil à s’être levés, la quantité
de sourires à s’être dessinés à l’écoute
d’un morceau de Pavement. On s’abstiendra surtout d’estimer le nombre
de vocations à s’être créées à l’écoute
de ce dernier !!!
Par contre, cet hommage en forme de compilation permet de recenser quelques
uns des labels majeurs à avoir accompagné Pavement dans
son ascension : Drag City, Domino, Big Cat, Irma, Amazing grease,
Fortuna pop, Track & field, Bang !n touch & go, Kill rock
stars, Trcuk rec, Unhip rec…
Homesleep et son passionné patron auront dans ce chemin de croix
de près d’une année réuni les contributions de trente-six
artistes parmi les plus influents de la scène indie des dernières
années.
La présence de chacun de ces protagonistes n’est pas le fruit du
hasard mais la concrétisation d’une foi totale et d’un amour immodéré
pour les lignes de guitare de Malkmus et ses potes. Ce même amour
qui a fait naître le projet dans la tête du mentor.
Si les artistes tiennent Pavement comme une de leurs influences majeures,
c’est dans la restitution de leur interprétation qu’ils donnent
à lire le legs et la gratification qu’ils en ont tiré. Pas
ou peu de caricature, chacun se réappropriant les morceaux de la
bande à Malkmus, Ibold, et West… dans un grand écrin de
sincérité. Le résultat, comme un écho du plaisir
qu’ils y ont pris est un double album parsemé de petites perles
mélodiques imparables, de mélodies pop échevelées,
de joie, de gaieté, de tristesse, d’atermoiement aussi.
Avec Spearmint, Bardo Pond, Quickspace, Saloon, Fonda 500, Micevice, Scream,
Elgoodo, Kicker, Lenola, Comet, Solex, Fuck, Trumans water, Silkworm,
Lunchbox, Tiger wood, Fivehead, Boxstep, Tindersticks, John Wayne shoot
me, Tyde, Magoo, Panty lions, Future pilot aka… Une émotion intense.
L’album de l’été !
JJ.
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EHB
Fragment d’un discours amoureux
(Optical Sound &Aspic records/Chronowax)
Emmanuel Hubaut est un homme occupé et préoccupé.
Il s’évertue à varier les plaisirs autant qu’à brouiller
les pistes. Une évidence lorsqu’on aime voyager sans être
suivi.
À mon sens, Emmanuel Hubaut vit son implication artistique de manière
totale, au sens où il a une approche transversale de la musique
et où il n’hésite pas à remettre perpétuellement
en question ses travaux précédents pour se réinvestir
dans d’autres projets.
Des facettes ambivalentes et diversifiées de ceux-ci, dans l’espace
et dans le temps ont fait de lui un artiste pluridisciplinaire qui sait
écouter l’appel de l’inconnu et surtout comprendre les battements
de son pouls quand un projet mérite d’être mené. EHB
et ce Fragment d’un discours amoureux est une nouvelle parenthèse
dans son cursus alors que LTNO continue son chemin.
Des compositions qui s’imprègnent d’une musique néo-industrielle
qui aurait gardé en mémoire un caractère organique
très marqué. Le deuxième morceau où les battements
d’un cœur composent le rythme est à ce titre éclairant.
On déambule dans les artères d’une ville gagnée par
la brume, où le silence orchestre les grésillements fiévreux
et les nappes opaques de bruits blancs. Mais à l’occasion, EHB
désintègre aussi " l’habitat précaire urbain "
avec des titres de breakbeats urgent, où cut-up sonores et samples
érotiques s’immiscent (Loquèle).
À la traversé des genres de Mimetic Mute, Elektroplasma
et des artistes d’Hymen (End).
À noter qu’EHB est né à l’occasion de l’installation
de l’architecte Didier Fuzie Faustino à New York. Sur sa route,
il a rencontré Joël Hubaut (son père ?) Made in
Eric, Mami Chan, Christian Death, Y front… en somme, il a compris que
la beauté du monde ne s’appréhendait pas à l’occasion
unique d’un facette.
JJ.
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LAURENT
ROUSSEAU Y’a de la nonne
(L’oreille électronique)
La
maîtrise technique de Laurent Rousseau est étonnante,
presque déconcertante. Pourtant, loin lui semble l’idée
de vouloir en faire montre. Comme une manière de trancher entre
la technique, l’instinct et la sensibilité (même si sur cet
album, les trois se rejoignent fréquemment), il alterne espaces
d’apaisement, passages de triturations, envolées de percussions
et atmosphères contemplatives comme ce lent discours décliné
en arabe plage 2, le passage en japonais de la plage 7 ou ces coulisses
de scieries en plage 4 ; dissertations musicales solitaires, virtuosité
de l’instrumentation, improvisation, petites embellies électro-acoustiques
ou grincements/crissements de surfaces concrètes, marquent l’identité
de ce Y’a de la nonne.
Un
album apaisant et introspectif qui ne se prive pas pour autant de malaxer
la matière brute du son et au passage celle de notre être.
JJ.
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MONADE
Capitalisme ou Barbarie
(Duophonic/Chronowax)
Après la perte de son inestimable sœur de sang, Lisa Sadier
revient avec un projet solo, laissant à Stereolab encore le temps
du deuil…
La définition de Monade nous donne un terrain d’analyse :
" unité " chez les pythagoriciens, unité
parfaite qui est le principe des choses matérielles et spirituelles.
Chez Leibniz, substance simple, inétendue, indivisible, active
qui constitue l’élément dernier des choses et qui est doué
de désir, de volonté et de perception.
Gageons que dans le petit lexique personnel de la chanteuse, ce mot trouve
une place quelque part entre ces deux définitions. En amoureuse
des mots, on ne peut s’empêcher de penser à son anagramme
" nomade " qui en dit tout aussi long sur les espaces encore
vierges, à conquérir, de sa musique.
Une musique totalement dédiée à la naïveté,
une douce illusion de gaieté, un idéal d’égarement
et d’allégresse à atteindre où chacun aimerait trouver
refuge quand tout va mal.
Pourtant, au delà des qualités, on recherche dans cet album
des repères suffisamment proéminents pour soutenir notre
regard. On a quelquefois du mal à défendre le point de vue
musical de Capitalisme ou Barbarie, parce que trop léger
ou trop céleste pour nous, pauvre terrestre que nous sommes…
JJ.
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MONTREAL
FREE [V/a]
(No type/Métamkine)
Le label canadien passe à l’offensive, se décidant à
construire un système d’irrigation complexe, chenaux d’alimentation
pour les marais bosselés du free-jazz, les réseaux méandriques
de l’improvisation, les plans d’eau infinis de la folk et du post-rock
pastoral. En fédérant la quintessence de ces courants, No
Type se fait l’écho d’un travail de terrain entamé par la
Casa del Popolo (lieu de concerts, de rencontres humaines, initié
par Mano Fezzente, GSYBE).
L’occasion de croiser et de retrouver les étoiles naissantes, les
étoiles filantes, naines noires et autre supernovas de la scène
montréalaise, parmi lesquels Sam Shalabi et Alexandre St Onge,
de Shalabi Effect (les amateurs de rock spectral type FSA-Roy Mongomery
et les habitués de Kranky ou Drunken fish rec apprécieront
ce retour), mais également Thierry Amar (God Speed), Mathieu Balanger
(Morceaux de Machines, Napalm Jazz), etc.
Une corrélation de talents, répartis tels des points cardinaux
entre : Po, Gypt Gore, Burns/N. Caloria/J. Heward et Balai Mécanique.
Quatre introspections dans le free et l’improvisation qu’il convient de
développer.
Po avec sa " provocative operations " (à
ne pas confondre avec Tô, le jeune improvisateur de chez Savoir-Faire
53) et la rencontre de deux couples mythiques de la scène improvisée
et atmosphérique. Deux trajectoires pour deux " générations "
de musiciens. John Heward et Rainer Wiens, anciens brisquards et pionniers
des musiques indépendantes sur la scène montréalaise ;
Sam Shalabi et Alexandre St Onge, plus connus sous le pseudonyme de Shalabi’s
effect, groupe mythique pour tout amateur de FSA ou Kranky qui se respecte,
et auteurs d’albums miraculeux.
Ils délivrent à quatre des pistes plus que des voies pavées,
des interrogations davantage que des affirmations autour du rapprochement
d’une pratique free et d’une approche " préparée "
de l’instrumentation. Un questionnement constant, fluet et ondulant qui
laisse beaucoup d’intéressantes interrogations à l’auditeur
(attentif). Un ouvrage incertain, lapidaire, cyclothymique…
Gypt Gore, c’est davantage l’école Naked City-Borbotemagus-Pain
killer que les clairières lumineuses de Po. Une énergie
de la destruction, et de l’improvisation qui a pour paradoxe d’être
complexe et construite dans ses schémas " d’attaques ".
Une ondée sonique, étincelante et féroce qui ravage
beaucoup de choses sur son passage, y compris nos oreilles. Les oto-rhinos
ne leur disent pas merci. Une approche radicale pour une écoute
fructueuse mais éreintante dont on sort anéanti, mais en
paix avec soi-même, comme d’avoir vécu une expérience
hors du commun. Entre parcours du combattant et attentat sonore. Le sax
de Philémon virevolte et les guitares de Dickson et Shalabi viennent
en écho de ce tourbillon. Des terroristes à guitares.
Le Trio Burns/Caloia/Heward a longtemps été un duo
construit autour de Heward/Caloia auquel est venu s’adjoindre la guitare
exaltée et combative de Burns. Une modification de tracé
qui opère de nouvelles voies de réflexion et de création
dans leurs jeux respectifs. Sans doute moins d’intimité, mais comment
les chuchotements d’un trio pourraient-ils rivaliser avec les susurrements
d’un ménage à deux ?!
Plus liée et mélodique, la partition s’autorise quelque
fois des chemins défendus. Ce trio guitare-basse-batterie impose
un rythme pondéreux à la composition, installant un climat
lourd avant d’introduire de petites déclivités arpèges,
incertitudes frottées. Puissant.
Enfin, Balai Mécanique, le boys band le plus prisé
de la côte est du Canada, comptant pas moins de six piliers de bars
(La casa del popolo) mais surtout, éminences grises de la scène
moderne montréalaise, parmi lesquels Philémon (de Napalm
Jazz/Morceaux de machines- Gypt Gore), Thierry Amar, Sam Shamlabi (Po-Shalabi
effect…), Jacques Gravel et Will Glass. À première vue,
au regard du line up, on pourrait imaginer une compression sonore entre
les différents groupes pré-cités, comme si la nature
n’opérait que par addition. Or, il n’en est rien, les lois de la
physique ont leurs raisons que la raison ne connaît pas. Balai Mécanique
dépeint au contraire un univers très en retrait des autres,
plus expansif et aérien, plus prompt à régénérer
notre attractivité pour la matière. On sent que chaque intervenant,
en plus de se faire plaisir, trouve ici un terrain de jeu exaltant, une
occasion de mettre en pratique avec passion, ingéniosité
et complicité son savoir-faire respectif. Par phénomène
de vases communicants, on trouve un plaisir équivalent à
écouter leurs divagations. Extraverti et énervé.
JJ.
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MIKE
HART Upside down in the full face of optimism
(limonade)
L’idée communément admise selon laquelle les Australiens
ont la paresse comme deuxième nature et une connaissance du monde
qui se réduit aux frontières de leur pourtant vaste pays
ne se vérifie pas toujours. En ce sens, Mike Hart est sans
doute l’exception confirmant la règle ; un être déterminé
qui a écumé en l’espace de trois ans, les coins les plus
éloignés de la planète, trouvant dans le live sa
seule catharsis à la tension et à la fatigue cumulée.
Deux ep au compteur qui lui auront permis d’asseoir sa jeune renommée
comme successeur de Jeff Buckley au panthéon des guitaristes solos.
Un deuxième album, donc, qui compte parmi ses fans Ben Harper,
s’il vous plait, ou le manager de Buckley fils. Un équilibre entre
folk song déchirée, poussées lyriques électrisées,
entre orchestration intimiste et effervescence incantatoire. La peine
que l’on ressent à l’écoute de sweet consequence,
la douce quiétude présente sur If you could, fac in the
water ne sont pas feintes, pourtant, on regrette l’aspect grossier
des sections rythmiques sur les titres rocks (Silhouette, nothingness)
façon Pearl Jam et une production excessivement soignée,
soustrayant simplicité et naturel à nombre de ses belles
balades. Un chanteur, qui comme Ben Harper, gagnerait à axer ses
compositions strictement sur sa voix.
JJ.
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METAMATICS
NachtPlank
(Hydrogen Jukebox/La baleine)
Le label Hydrogen Jukebox continue d’alimenter les belles pages d’une
musique électronique sans œillères dans un travail exigeant
de sape systématique des cloisonnements entre motifs du genre.
Une approche suffisamment large de la musique qui lui permet d’intégrer
en son giron des artistes aux vues aussi diverses que Norken, Technova,
Black Dog & Black Sifichi ou [The black] comme ils se surnomment et
leur poésie noire futuriste, A1 people et ses hoquets analogiques,
ou encore Metamatics et ses tics physiques violents et ingérables.
Metamatics, justement, avec Nachtplank, le dernier album, est
le projet parallèle de Lee Norris dont les travaux sous la formation
Tone Language sont de toute beauté (Albums sur Korm Plastics).
Une fois ceci intégré, on comprend mieux la présence
de Frans de Waard sous sa formation Beequeen au côté d’intervenants
plus classiques du remixe tels que Greg Davis, Funckarma, Aeiou, Mati :k,
Andreas Tilliander, Alvoa, Purusha, etc. Un collectif compact qui au détour
de trois titres phares (Troarn, Carhaix et Nonant)
compose des univers aux frontières de l’ambient dark, d’une électronica
pointilliste et fluette ou d’échos spectraux ou de strates embrumées.
Une transfiguration limpide et osée de ses travaux originaux.
JJ.
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TLONE
vivid scenes
(Musik experience)
À la faveur d’un album éponyme sorti en 2000, Tlone
avait converti nos enceintes domestiques à ces mélodies
grippées et virusées, variétés rares d’abstract
glitchs salement déjantés et d’ambiant extatique pure et
cristalline. Synthétiser la musique de Tlone, c’est évoquer
l’existence de couleurs mélodiques virtuoses dans lesquels s’agitent
des résidus dynamique sinusoïdaux, des déchets d’électronique
en déperdition, de l’expérimentation en laboratoire, également.
Boards of Canada, Autechre, Plone, John Carpenter, Discom, Richard Devine,
Brothomstates, Minifer et tant d’autres, énumèrent à
leur façon les influences du groupe sans toutefois les montrer
du doigt. Une musique où l’accroc, l’imprévu digital, le
crachin numérique accompagnent les tourbillons dépressifs
des compositions sans entraîner pourtant l’auditeur dans la chute.
On notera au passage les très beaux mixes de Groupgris et son abstract
électro-hiphop gonflée, Erik Minkkinen dans une veine bruit
blanc digital très V/vm et enfin Infant et ses rêves froissés
de grand nord. Hautement recommandé.
JJ.
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THOMAS
PERIN Calligraphie sonore
(L’oreille électronique)
L’objet est irréel, inédit, il irradie nos pupilles
de sa beauté, de son non-conventionnalisme. Un digipack cartonné
oblong, s’étendant de toute son horizontalité.
Des calligraphies posent pour leur part les premiers jalons de l’univers
de Thomas Perin, sorte d'attachement où se mêlent
de manière inextricable art graphique et art sonore. Un prolongement
naturel ? Sans doute, même si l’analyse et l’écoute
de sa musique demandent une exigence autre que la simple interrogation.
L’intérieur n’enlève rien à la beauté abstraite
de l’enveloppe externe… On navigue au milieu de petits feuillets sérigraphiés,
comme autant d’œuvres passées à la loupe du talent et de
l’âme créatrice de Perin.
La musique nous plonge dans un état second, pas moins réel,
pas moins abstrait, qui foule sans intermittence la frontière entre
gravité et apesanteur. Des titres aux intitulés surréalistes,
jamais loin des délires lettristes d’un Isidore Isou ou d’un Maurice
Lemaître : Mixographie, Game-boy zèbre, Fréquence
de l’West, Castle of ghost, Achille talonne supernova, Gare aux autruches ;
Fountainofink…
Depuis les climats délétères de Sinusoïde
aux incontrôlables et affranchies boucles et triturations présentes
sur Mixographie, Thamieu, Achille talonne supernova, on navigue
dans une joyeuse cacophonie maîtrisée à cheval entre
les plunderphonics d’Oswald, les délires de Stock Hausen &
Walkman, la lubricité d’un People like us, l’extravagance d’un
Pierre Bastien l’exigence acoustique d’un GRM de province et le caractère
dansant et débridé de gens de chez Rephlex, voire V-Vm (!!)
etc. La calligraphie vue ici comme une parabole d’une pensée libre
et créatrice, à même de nourrir un phrasé musical.
JJ.
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