SOMMAIRE

ENTRETIENS
. Programme .
. Clinic .
. Piano magic .
. Bip-Hop .
. Arbouse Rec .



A LA LOUPE
Le label V/VM
Le label Z & Zoé

LA DEMOTHEQUE #1
LA DEMOTHEQUE #2


Chroniques de
Julien Jaffré

[Contact]
CHRONIQUES #12
DONNA SUMMER . SYLVAIN CHAUVEAU . PIERRE REDON  . MAPSTATION Vs RAS DONOVAN . FONICA  . KAMMERFLIMMER KOLLEKTIEF . TRAVAUX-PUBLICS  . STATE RIVER WIDENING . ANTHONY PATERAS & ROBIN FOX . INGFRIED HOFFMANN . LEXAUNCULPT . THRENODY ENSEMBLE . BERG SANS NIPPLE . DORON SADJA . TEPR . DISCOM . REPEAT . SUPERSILENT . NAW . KOBE . TAPE . ROOM 106 . CREMASTER . I’M NOT A GUN . SET FIRE TO FLAMES . FIENDISH FIB . RAFAEL TORAL . MUSCLORVISION . ULRICH SCHNAUSS . TIM HECKER . ALEJANDRA & AERON . IAN EPPS . MELATONINE . TELEDUBGNOSIS . ALL TOMORROW’S PARTY . BUZZCOCKS . JASON LESCALLEET . FREEFORM . HERPES O DELUXE . HECATE Vs LUSTMORD . MAPS & DIAGRAMS . DUB TRACTOR . DEATHSITCOM . PRIKOSNOVENIE . COIN GUTTER . DOF . ACIDE HOUSE KINGS . THE CHAP . VACUOUS NINNIES . CUANTICO . ORANGE BLACK . PARTYCUL SYSTEM . HECKER . FARMERS MANUAL. DISPLAY PARTY . TUJIKO NORIKO . THE SURFIN ROBOTS . RED SNAPPER . DAVIDE BALULA . DANIEL JOHNSTON . MANOS ARRIBA . COLLEEN . OPIATE . FAT CAT . THE NATIONAL . WORLD’S END GIRLFRIEND . STOLOFF & HOPKINSON TM . MONIQUE JEAN . FRANCIS DHOMONT . SEAGULL SCREAMING KISS HER KISS HER . IMPERIAL TEENS . EVEREST . JOE WILLIAMSON . BILL LASWELL . IMITATION ELECTRIC PIANO . SNAWKLOR . FRED POULET . V/a ID WET . RENIER LERICOLAIS . MINIFER . A. DONTIGNY/DIANE LABROSSE . A TRIBUTE TO PAVEMENT . EHB . LAURENT ROUSSEAU . MONADE . MONTREAL FREE . MIKE HART . NachtPlank . Lost & damaged . TLONE . THOMAS PERIN .

CHRONIQUES #11
DORA DOROVITCH . MASSIMO . FLIM . SUBURBIA . DAKOTA SUITE . QUINTET AVANT . THE MAJESTICONS TROUBLEMAKERS . DORINE_MURAILLE . SCHMOOF . FABRICE EGLIN / BENJAMIN RENARD . TONNE . HOMELIFE . LAUDANUM . PULP FUSION . ELEKTRONIK . APRIL MARCH . KOMET Vs BOVINE LIFE . MAJA RATKJE . GISCARD LE SURVIVANT . NAD SPIRO . POPULOUS . SNOWBOYS . JOHN BELTRAM . SR. CHINARRO . HOGGBOYS . AMON TOBIN . STUNTMANN 5 . SON OF CLAY . TENNIS . THE CARIBBEAN . PANOPTICA . TELEFAX . ALEXANDER PERIS . IMAGHO . SKETCHES OF PAIN . FRZ-IMAGHO . MOU, LIPS . SCANNER + TONNE . SALVATORE . VENETIANS SNARES . ANGEL . ABSTRACT KILL AGRAM . Battle of the Year 2002 . HAND OF DOOM . SPREAD LOVE .BURT BACHARAH . CALLA . PURÉE NOIRE . ELEKTRONISCHE MUSIK TAPE 10 . OBOKEN . RUBIN STEINER . BLACK DICE . BIP-HOP VOLUME 6 . EVA CASSIDY . CYANN & BEN . LEE HAZLEEWOOD . EPSILON SIGMA CLUB . RODAN . EUELL . ANALOGUE . MANTA RAY . KAITO . A1 PEOPLE . STARGAZER

CHRONIQUES #10
CAVIL . CAMPING CAR . POST OFFICE . DAVID WHITAKER . INFORMATION . DELAY MAKES ME NERVOUS . V/a LEAF . SOGAR . KAT ONOMA . CADIER / BURGER . MY LITTLE CHEAP DICTAPHONE . COLLECTION OF COLONIES OF BEES . SPECTRE FEATURING . SENSATIONAL . FENNESZ/MAIN . TARTWATER . NICOLAI DUNGER . ALEXEI BORISOV . BUSY SIGNAL . UN CADDIE RENVERSE DANS L'HERBE . IDAHO . MS JOHN SODA . OLIVIER QUEYSANNE . GOR . BJÖKENHEIM / HAKER FLATEN / NILSSEN-LOVE . PAUSE CAFE . MUS . FLEUR . FORMANEX . THE PHENOMONOLOGICAL BOYS . GHISLAIN POIRIER . MORGAN CANEY & KAMAL JOORY . DENZEL & HUHN . V/a PARTICULAR SYSTEM . RONNIE SUNDIN . ACTIVE SUSPENSION VS CLAPPING MUSIC . OLIVIER LAMM . THILGES 3 . ZOHREH . TUE-LOUP . HLM . FAUST . BUNGALOW . DICTAPHONE . COLLIN OLAN . 17 HIPPIES . NOONDAY UNDERGROUND . DENSE . VISION SHRINE . DAVID DESIGN . PURE . KUBIK . ACETATE ZERO . MASON JENNINGS . DIAGONALE STABLE . ANTIFROST . CORDELL KLIER . MINAMO / JÔRG-MARIA ZEGER/I-SOUND + D. RAFFEL . MIMETIC MUTE . PHILIP SCHEFFNER . TRAVAUX PUBLICS . MONTAG . T. RAUSCHMIERE . COLLEN . GUITAR . END . BATTERY OPERATED . IDENTIFICATION . ALAIN BASHUNG et CHLOE MONS . BREMSSTRAHLUNG RECORDINGS . DAYGAL . MICHEL & MICHEL . LA GOUTTE . RJD2 . TUJIKO NORIKO . SUPERSOFT [14-18] / ANDY’S CAR CRASH . GEOGRAPHIC . El-P . 22 PISTERPIRKKO . MLADA FRONTA . NO REWIND V/a . MILEVA . TRIBECA . DING DAWN . SCORN . THE WALKMEN . YUNX

 

chroniques 2002
chroniques 2001
Entretiens

 
 
CHRONIQUES #13

> Andy MOOR/ John BUTCHER/ Thomas LEHN Thermal (Unsounds/Metamkine)
MARKO CICILIANI Tulius Rooms (Un sounds/Metamkine)
Après plusieurs sorties remarquées et distinguées, notamment le duo Andy Moor/Kaffe Matthews ainsi que le projet Grand Mal (Bennett/ Büttrich/ Wellmer), le label Unsounds revient à la périphérie de notre regard (audition) à l’occasion d’une double sortie, celle du surprenant trio Moor/Butcher/Lehn et du premier album solo de Marko Ciciliani.
Cette rencontre est à plus d’un titre admirable… D’une part elle met en confrontation 3 artistes majeurs de la scène internationale Thomas Lehn, inventeur du processeur du même nom, figure emblématique des années 60’(il évolue ici sur un EMS), John Butcher, le saxophoniste angulaire de la scène improvisée et Andy Moor, guitariste investi et intransigeant, qui prolonge toujours et encore son implication, son investissement dans les sphères improvisées tout en gardant une intégrité sans faille au côté de Kleta Red et évidemment Dog Faced Hermans et The Ex (en solo au côté de Kaffe Mattews, Thurston Moor, Tortoise…). Une expérience d’improvisation pure, dense, abrupte, radicale où la guitare temporise les soubresauts du synthétiseur et les jets de flamme incandescents du saxophone. L’ombre du MIMEO plane sur ce disque, les silhouettes de Chadbourne ou Schmillker ne sont jamais loin… Une armada d’improvisateurs en rang serré, bataillon de têtes brûlées au service de l’insurrection rythmique, de la sédition mélodique.
Thermal , par sa concision et la fusion des genres qui s’y développent font monter la pression de quelques degrés supplémentaires.
Un set d’improvisation qui trouve avec Unsounds (qu’on peut traduire par insonorité ou non-sons) un label ami.

Marko Ciciliani, musicien trentenaire d’origine Croate, a déjà œuvré à la diffusion de son savoir, sur tout type de supports, au sein d’une très large représentation de structures, depuis les compagnies de théâtre jusqu’au concerto, en passant par les orchestres de chambre… Un Tullius Room qui trompe son monde en débutant par de pures pièces classiques où l’électronique est gommée si ce n’est absente… Josh Dillon, qui fait plus que l’épauler au Piano voit discrètement les nappes de soundfields ambiant voilées ses envolées, perturber le cours fluide des mains glissant sur la grêve de note… On doit s’autoriser une certaine liberté d’écoute avec ce disque, tant il nous renvoie vers les canons des genres improvisés académiques ; on a un peu de mal à rester en haleine, pourtant, devant cette élégante démonstration.
> TELLEMAKE  morning ep (Angstrom records/La Baleine)
Ce qui a permis à la musique électronique au sens large (avec tout ce qu’elle comprend de sous division) de connaître un second souffle tient pour l’essentiel à la “requalification” d’une frange large de musiciens ou de concepteurs sonores en provenance directe d’autres chapelles indépendantes (Musique industrielle, noise, Rock Indé).
Il n’est pas faut d’affirmer que ces musiciens en investissant leur patrimoine acquis, la somme de leurs expériences passées dans la création, ont insufflé à l’électronique, au break-beat dans le cas  présent de nouveaux horizons créatif, une épaisseur réelle aux compositions.
Tellemake est de cette veine. l’énergie rythmique développée ne se perd pas dans le vide, elle est soutenue par de lourds courants dark ambient, et où l’asphalte, la grève, les grésillements analogiques, l’abrasivité mécanique perturbent la bonne marche de ses “mélodies” souterraines. Des titres (Cox/Postbreaker/tallis/camora) qui laissent cheminer cette idée de non-retour, de désordre, de maelström.
> HEADPHONE SCIENCE We remained faded (No Type/Metamkine)
No Type, division d’Ambiances Magnétiques a sans doute marqué un tournant dans son approche musicale autant qu’une petite révolution dans la ligne directrice de sa production, en sortant l’an passé, des références aux pourtours “mélodiques”. Fers de lance dans des domaines autres, essentiellement la musique improvisée et la création électro-acoustique, Éric Dorion a ouvert le champ des possibles du label en offrant une alternative musicale qu’on qualifiera de “narrative et rythmique” ; l’occasion pour des formations telles qu’œuf Korrekt, et à présent Headphone Science de laisser libre court à une imagination débridée.
Une aventure que ce Headphone Science, barrée par le capitaine du navire.
Pour Ambient que soit le ton général de l’album, s’affiliant auditivement à des formations expertes et trop rares telles que The Orb (et ses premiers chefs-d'œuvre) ou FSOL (période Dead Cities), cet album reste profondément marqué par le Hip-hop et l’essence de son rythme.
Une atmosphère obscure et ombrée, qui garde pourtant une visée optimiste ;  un climat sur lequel vient s’agglomérer une formidable foule de rythmiques énergique, saccadée, finement cisselée comme une exégèse/ une interprétation personnelle des travaux mis en avant par Scott Herren voire quelques fois d’Autechre (Air bubble Material). Dustin Craig (Headphone Science), résident d’Oakland en Californie réalise pour No Type, après divers albums en ligne sur Subverseco et Observatory un “we remain faded” d’une grande lucidité et attractivité (le très jazzy To dine in distance).  De l’abstract hip-hop qui aurait sombré dans les limbes d’un océan d’ambient. Un excellent moment.
> THOMAS FIANNCETTE  Bricolage  (Relax Ay Voo) [Mèl]
On est dés le départ adroitement happé par la beauté de l’objet, monochrome de cuivre et de Canson chocolat où s’expose des collages splendides, entre surréalisme (Duchamps), poésie dadaiste et esprit Fluxien…
La musique achève de nous faire glisser vers cette piste… un enchevêtrement de bandes-son volées à l’histoire, de rythmique dub, de chorus d’orchestre, d’introspection arabo andalouse à la guitare, de petites mélodies de verres, branlantes, prêtes à se briser, de divagations électro- acoustiques, de ballade folk boiteuses, de grésillements de vinyl… un petit monde qui se succède avec une belle régularité et une somme énorme de talent. Une litanie sans début ni fin, qui donne la mesure de l’univers si personnel et inventif de cet homme orchestre.
Un exercice de style vraiment réussi qui nous entraîne des univers de Pierre et le loup aux arrangements ténébreux de Vincent Gallo, de documentaires scientifiques nocturnes aux portes-effluves du Maghreb… Une vision décomplexée, raturée de la réalité, qui met en avant l’individu comme un puits sans fond de richesse ! Surprenant mais tellement jubilatoire et rassurant sur la nature humaine. On en veut encore !
> HAT MELTER Unknown album  (Crouton/Metamkine)
Dans sa quête esthétique de sonorité “pure” Crouton record avait déjà insufflé un souffle divin à la création électro-acoustique, convertissant à la faveur du Face A de Collections of colonies of bees (le duo Roseneau/Mueller), nombres d’adeptes de l’instrument à cordes.  Une vision sensitive et belle du jeu.
L’exercice de style ici défendu renouvelle si ce n’est la pratique, du moins l’approche. Construit comme un diptyque, Hat Melter est la résultante du travail commun de 4 passionnés (Steve Hess/Jeff Klatt/Jon Mueller/Matt Turner).
Une improvisation où il est question de texture de cordes, d’harmonie de percussions, de bourdonnements, de vibrations égarées, de bruitisme, de rupture soudaine et insaisissable.Une forme de Safari élaboré qui consiste en la capture à l’état sauvage des sessions live acoustiques de cette étrange formation où 2 cellistes s’opposent à deux percussionnistes.
En un tour de manège égaré et fulgurant, Hat Melter convoque en sa demeure les plus éminentes variétés d’expressions que la musique puisse créer ; la béatitude complexe du Cello, la tessiture criarde des cordes, la chaleur ondoyante des percussions, l’implacable silence, tout nous entraîne sur la pente escarpée de l’improvisation pure… dans ce qu’elle a de plus belle… et de plus incompréhensible et exigeante.
> SACK UND BLUMM Kind Kind (Staubgold/Chronowax)
Drôles d’oiseaux que ces deux olibrius de talents, Harald “sack ” Ziegler et Frank Schültge Blumm, qui forme ce duo inassorti au possible.
A eux deux, ils impose une certaine idée du Jazz, qui semble nous entrainer vers les territoires verdoyants et mystiques  de Pharoah Sanders ou Yuseef Lateef , bifurquant promptement vers une combinaison pop Curiste avant de finir en opéra lo-fi Chinois ou en Tango nocturne.
Un carrefour d’influences où l’électronica et la pop sont loin d’être absente, mais qui garde une cohérence absolument surprenante, permettant au duo, des tours de passe-passe qu’on pensait seul réservaient à des groupes tels que To roccoco Rot, Matmos ou Dictaphone.
On retrouve quelque chose de triste, de cassé, mais qui laisse pourtant ouverte une fenêtre sur une forme d’espoir. Un peu de l’univers enfantin de Klimperei/ou de Takagi Masukatsu et les atmosphères bricolées de Pierre Bastien. Le sentiment d’exotisme nous entraîne par le choix de champs d’incantations vers les terres d’Asie australe ou d’Afrique méditerranéenne.
Un fourre-tout musical ouvert, sans doute trop subtilement amené, (au genre) trop habilement entremêlés pour attiser la curiosité d’un grand nombre d’entre eux… et pourtant, qu’ils ont tort ! Grisant et capiteux.
> Giscard le Survivant/Le vieux Thorax S/t (ragondins Mondains/Autoprod)
L’affiche paraît alléchante, virile ; elle évoque d’ailleurs davantage un combat de catch péruvien qu’une joute d’électronique déviante. Et pourtant, les artistes et le disque existent bien et soulignent les détours complexes que prend quelquefois l’analyse simple de la situation. Le disque tourne physiquement dans les platines à une vitesse exagérément élevée révélant le caractère impétueux de cette jeunesse. Une jeunesse par ailleurs active et cynique qui se moque de sa crédibilité… quelques intitulés de titres en attestant (Un tour en R15, Je suis venu te dire que j’ai été faire les courses (je suis allé ?), véritable histoire du Mars qui se prenait pour une merde de chien, etc.) Le principal intéressé (giscard le Survivant) nous ayant déjà habitué à l’exercice de style.
La musique, pour sa part est un assemblage de sons groovy déviants et dansants, de samples furieux et enjoués façon Tipsy, Rubin Steiner et plus généralement estampillé Platinum record pour le vieux Torax ; et un pot pourri de nouvelles de l’ORTF passé à la moulinette dadaïste pour Giscard le Survivant… C’est souvent mal enregistré, approximatif, ça part dans toutes les directions… tiens, tiens ! Serions-nous en train de tenir l’équivalent des seigneurs de VVM ? Réponse au prochain épisode.
> BIOCHEMICAL DREAD (Richard H Kirk) Bush doctrine (Cocosolidciti/Limonade)

À l’heure où le monde plonge, contraint et forcé dans l’unique et consubstantielle vision féodale et limitée d’un pays-continent, l’activisme politique de Brian Jones (Muslimgauze), pour subjectif et discutable qu’il soit nous manque cruellement.
Heureusement, certains osent rompre le silence au détour de ce qu’ils savent le mieux faire : mettre en musique des histoires.Richard H Kirk saisie la polémique autour de la désastreuse politique Américaine au moyen Orient pour opérer une analyse impitoyable.La critique ici formulée par Richard H Kirk  est d’autant plus implacable et cinglante qu’elle est articulée par un musicien dont la connaissance et le niveau de compréhension des pays du moyen et de l’extrême orient n’est plus à faire. Un réquisitoire sans appel contre les États-Unis où ici, tout est question de symbolisme : la peur véhiculée, la charge héroïque de l’électronique, les senteurs fardées de l’orient qui se découvrent aux détours des samples ciselés.
L’ancien leader Cabaret Voltaire (mais aussi Sandoz et Sweet Exorcist) évite pourtant le sempiternel didactisme entre force du bien et force du mal… le manichéisme  n’est pas ici  la voie choisie car elle ne fait que conforter chacun dans ces positions.C’est bien à un choix de société que nous confronte Kirk, une mise en relief où propagande des machines, étourdissante furie, contamination des modes d’expressions s’opposent et se confrontent. Un langage stupide et primaire de l’image que seule la musique semble à même de faire ployer. Dansant !

> JOHN TEJADA/ARIAN LEVISTE  Fanfare sake  (Playhouse/La baleine)
John Tejada lorsqu’il ne s’adonne à des figures de style en solitaire ou accompagné comme c’est le cas sur ce “fanfare sake” évoque pour quelques ascètes de l’électronica le co-pilote du subtile  "I’m not a gun" en compagnie de Takeshi Nishimoto.
Les condensations du groupe de City Center Office sont en faite bien loin et prennent tout leur éclat et leur vivacité à l’écoute de cet opus.
Fanfare Sake est un album parmi tant d’autres, comme Playhouse en produit au kilomètre linéaire. Une parodie du genre, serions-nous presque tentés de dire, tant les 11 titres caricaturent sans l’énergie qu’on aimerait y déceler les canons du genre.
Une plongée en abîme dans la house qui malheureusement flirte avec la mauvaise répétition ; genre qui avait pourtant fait de ce critère une vertu…
> DESTROYER  This night (Talitres/Chronowax)
Bien surprenant sobriquet pour un projet à la facture pop tel que Destroyer, qui semble enclin à ne rien détruire d’autre que les profondes racines de notre engourdissement.
Danil Bejar entreprend, sur le tare, après huit longues années d’attente, à porter son projet et à en récolter les fruits. Fruits d’un labeur couronné de rencontres et d’imprévus, de succès et d’échecs, d’humiliations et de gloires éphémères.
Partie d’une esquisse low-fi, Daniel au sein de son projet “Destroyer” aura eu le courage de “partager” ses compositions, transformant en quintet son petit projet intime.
Vancouver trouve dans ses compositions et ses textes ciselés la chaleur qui manquait à ses hivers. En parallèle à The New Pornographer, Bejar continue à griffonner dans des recoins de feuilles les futurs accords de Destroyer.
We’ll Build Them a Bridge en 96 auquel se succéderont City od Daughter , Thief (avec une nouvelle formation en quintet) puis enfin Streethawk : a seduction.
This Night à la faculté d’éteindre les petites veilleuses de nos âmes pour nous laisser méditer sur ses égarements qu’on lit à découvert. La panoplie des grands jours et de sortie : une totale latitude est laissé aux guitares, les accords suraigus, la voix haut perchée, de Bejar s’emballe, éructe ses bleus à l ‘âme, impose une course à la batterie avant de se faire calme, libère les entraves des harmonies qui voguent alors entre le New York des années 70’, revisitent l’Angleterre des 80’ avec plus d’audaces, de risques aussi que le pourtant séduisant Streehawk. Des morceaux tels qu’Heres come the night ont la beauté absurde des grands morceaux… l’idiote beauté d’être là au bon moment, de raisonner avec l’existence à un instant donné. Pourtant au sens intimement que le groupe doit exaspérer autant qu’il doit susciter l’adulation, questions de choix. Et de nous dire qu’il manque peut-être le petit plus qui nous fera chavirer. Ça ne saurait tarder.
> PANTI WILL // Hell  (Dora Dorovitch/Discograph)
Le pamphlet littéraire, phase récente de la littérature a connu son zénith et son zéphyr en l’espace de deux siècles, produisant  à la manière d’un antidote puissant sur un vieux malade, une sortie de léthargie violente et emportée.
A considérer l’histoire courte de la musique, rares sont les groupes à s’être attaché à démolir avec entrain et gaieté, les acquis musicaux de ces dernières décennies : Negativland, Stock Hausen et Walkman, Janski Noise, John Oswald, Donna Summer (l’autre), The Aavalanches (dans un autre genre)… assez peu nombreux, en définitif.
PANTA WILL , pas forcément proche musicalement  des artistes et structures précités, cultive pourtant ce goût heureux pour une forme musicale de nihilisme, quelque chose comme une compression  dérangée (quelquefois), déviante (souvent) et ludique (toujours) du genre.
Un trio composé accessoirement de 2 Bosco et d’un Experience (michel Cloup) qui apporte dans une proportion réciproque, le savoir faire de quelques années d’expérimentations, de réflexions et de pratiques. Des morceaux qui cheminent dans un malstrom bordélique de références, depuis l’aspirateur de leur maman qui couvraient ACDC le dimanche matin à DJ Shadow, la grande musique autrichienne, les séries télé putassières, l’électro, les samples, la vie quoi !?
Ça pourrait ressembler à la dernière compile de chez V/VM, et pourtant c’est PANTI WILL !!  A ceux pour qui la curiosité et la diversité de vue ont encore un sens.
> VOKS  Vaks Vanskab ak
JOHN HEGRE A nice place to leave
UN CADDIE RENVERSE DANS L’HERBE Now there’s a weird taste (Dekorder/import)

Dokedocker est un nouveau label, une nouvelle membrane qui dans la terminologie d’Hundertwasser trouverait certainement place entre la deuxième et la troisième peau, entre le corps et la maison. La spécificité du format 3 pouces n’est pas un hasard : il prédispose l’esprit, l’acclimate par anticipation à une intimité de principe, une promiscuité esthétique. De petites pièces, déterminées dans la limite d’une durée, 21 minutes, et qui prennent ici la tournure de moments éphémères, de morceaux de vies fugaces, concise, petites comptines idoines du dedans.
Trois points d’ancrage à la réalité en attendant les sorties futures dont le sensationnel retour de The Hafler Trio avec ce The birds Must be Eliminated ; Matt Wand moitié pensante de Stock Hausen & Walkman dans un exercice en soliste et Black To comm. Revues de détail

Voks et ses marionnettes ingénues droites sorties d’un conte africain distillent des harmonies angoissantes, affichant des singularités communes avec les constructions de Danny Elfmann, (L’étrange Noël de Mr Jack, Edward aux mains d’argent, ed wood), les premiers morceaux de Plaid et des points d’ancrage avec Takagi Masakatsu ou Joseph Nothing par l’apport de candeur bancale et de naïveté branlante. De beaux petits moments où flotte les univers obsessionnels d’AAYA disques, d’Ata Tak, de ReR ou Crammed disc…

John Hegre, entame ses premières foulées en solo.Il reste plus connu pour ses collaborations croisées avec JazzKammer sur Rune Grammophon, notamment ;  a nice place to leave  est une étude d’impact du frottement des micros tonalités mêlées à des drones concis dans le climat hyperboréen ; un traité sur les qualités de l’air arctique dans la transmission du son.
Une œuvre isolationniste, cerclée de givre qui compose une bruine fine d’affects digitaux et de perturbations crayeuses, d’interférences analogiques et de bruits blancs éphémères. 

Un caddie renversé dans l’herbe, alias Didac P. Lagarriga est un Barcelonais d’adoption et brésilien de sang ; après des passages remarqués sur quelques fervents capteurs de contemporanéité musicale (Staalplaat, Ooze Baps, Open Circuit, K-raa-k, Amanita…), il vient poser son dévolu sur la jeune structure Dekorder. Une forme audacieuse de limpidité s’esquisse derrière les prises de position sonores d’Un caddie renversé dans l’herbe ; comme si le temps et les modes n’avaient pas de prises directes sur lui. Un univers onirico easy listening, à mi-chemin de Tétine Vs Sophie Calle, de Klimperei ou d’ambiances décomplexées et atemporelles chères à Pierre Bastien/ Pascal Comelade. Introspectif et relaxant.

> Ce que vous pouvez vous passer d’écouter…
Entamons cette nouvelle rubrique de pensées amères par le Lili Boniche, qui culmine à des sommets rarement atteints dans le mauvais goût… une grande déception si l’on considère la pureté des albums de jeunesse du chanteur, véritable sommet de musique juive-arabo-andalouse… la nouvelle génération, en voulant rendre hommage au vieux, (des reprises sans âme, des arrangements sans saveur) lui creuse avec un peu d’avance une tombe à ses mesures. À oublier définitivement Lili Boniche œuvre récentes (APC/PIAS)
> Ce que vous auriez du écouter…

En premier Lui le LFO, où l’épopée christique du retour fracassant du duo au-devant de la scène. Une musique sans complexe, élémentaire, dévoué au rythme et à la mélodie. LFO avait rédigé la genèse du mouvement techno avec Frequencies, ils sont en passe d’en écrire le (magnifique) testament avec ce …. Indispensable.

Lazyfish + Alexandroide OS (K²0/import) est un exercice de style extrêmement fragile et dansant qui utilise avec bonheur le Theremin, installant des ambiances Ed Woodienne sur lesquelles se dressent des défectuosités rythmiques proches des franges Autechre / Brothomstates / Ko-wreck technique / Crunch. Le duo se permettant quelques superbes passages d’ambient aquatique. Ça donne à la fois dans la nostalgie et l’anticipation ; c’est ancré dans le passé et l’avenir. Très bon.

> Ce sur quoi vous pouvez jeter une oreille désinvolte...

Scala On the rocks (PIAS) dans un tout autre genre, mets en scène à la faveur d’une chorale d’enfants quelques grands standards récents de la musique populaire parmi lesquels l’incontournable Kylie Minogue, mais aussi Garbage, Nirvana, Depeche Mode, Radiohead, Police ou Muse… sans pour autant être génial, on se prend à essayer de reconnaître les aires qui ont bercé nos radios, avec des reprises quelquesfois bien maitrisé (Smell like teen spirit) A découvrir.

Christ métamorphique reproduction miracle (Benbecula/La baleine) pour sa part dispense une Deep House suave, qui opère quelques variations électroniques et autres recherches formelles sur la microtonalité et les pulsations. Des morceaux comme “Odds, evens and primates”, “Fantastic light” ont la même belle teneur qu’un Boards of Canada… même si CMRM reste un peu plus brouillon. Mais de très bonnes choses, tout de même.

Réputé pour ne porter qu’un intérêt relatif aux compilations de tout poil, je dois pourtant admettre que Brazilectro Latin flavoured club tunes session 5 (Audiopharm/PIAS) pour ultra commerciale et marchande que soit sa démarche, diffuse nombre de jolies envolées exotique ; pêle-mêle Marcos Valle, Nicolas Conte, cette reprise de Sunny par Eli Goulart, sans oublier Senôr Coconut, Nu tropic, Zimpala… des fruits importés, en provenance du monde entier savoureux et dépaysant. Une très bonne introduction aux Nu-latino sound  !

La Compilation Mitek process (Mitek/La baleine) si elle ne nous offre pas l’opportunité de renouer avec les climats subtils d’Andreas Berthling nous permet cependant de nous frotter à une gamme large d’artistes affiliés à une scène électro-ambient minimaliste, de laquelle s’échappe quelques électrons virulents tels que Sophie Rimhenden et ses gimmick Mirwais / Madonna, andreas Tilliander et son miami sound électro ou Dwayne Sodahberk, échappé un temps de la fratrie  "Tigerbeat6".
On notera également les belles prestations d’artistes moins connus, davantage obsédé par les vapeurs atmosphériques et l’électronique liminaire tel que Mikael Stavôstrand l’affectionne, (Johan Fotmeijir, Hakan libdo, joha Skugge). Un peu en dessous de nos espérances même si variété et éclectisme sont au rendez-vous.

Markus Guentner Audio Island (Ware records/La Baleine) Ware impose avec toujours plus de prodigalité des artistes qui associent ambient lascive et house itérative. Des champs et des vallons déjà  foulés plus que de raison, qui ont pourtant vu l’herbe repousser sous leur pas. Cette house ronde et chaleureuse égraine avec générosité les poncifs du genre. C’est efficace et entraînant, et d’ailleurs, peut-on en demander davantage à ce style… Une valeur sûre pour les adeptes du genre.