JadeWeb | démothèque #1
 
 
 
 

ODD MOUNTAIN TRIO s/t (autoprod) [mèl]
Odd mountain trio foule avec la même beauté les terrains vagues de You Fantastic ! (sorti en 97 sur Skin Graft) avec comme points accordants, cette même recherche de tension, cette même attirance pour les vertigos de guitare et les clairières de silence.
Cet attrait pour le vide, traduit dans les ruptures de cadences, ou autres blessures à la mélodie, exerce des points de pression ciblés sur notre tension artérielle, notre corps choisissant pour un temps les tumultes de ces instants, bien davantage que le calme appliqué de notre quotidien. La seconde partie de la démo détourne son attention des constructions classiques et incorpore samples orientaux, moucharabiehs rythmiques, zelliges envoûtantes. Les cinq morceaux infiltrent notre conscience avec la même pertinence réaffirmée.
Une démo impressionnante de lucidité.
JJ.

 
 
 
 

BRAZIL La faim du travail ? (dadaprod)
Le luxe suprême de l’homme moderne est l’anonymat et l’isolement voulus. Voilà une des leçons que Terry Gillian nous aura apprise.
Brazil creuse d’une certaine manière dans ce sens en donnant une connotation hermétique à sa petite œuvre (plaisir solitaire ?), où s’exposent ici et là, extraits de bandes originales et de films choisis, de l’enfant nue de Pialat aux 400 coups de Truffaut, Trust me de Hartley et 300 appels par jour de Christophe d’Havilliée, avec en arrière plan, la musique sombre de rues désertes et les éclairs de joie des lampadaires.
Sur fond de déclins de guitares, de névroses de batterie, ces textes, hors du contexte, deviennent de magnifiques écrins pour l’instrumentation. L’enfance, croisement d’instrumentation god speedienne et de réflexion sur nos sociétés est à pleurer. Un travelling avant sur nos émotions les plus nobles.
JJ.

 
 
 
 

PLANETALDOL-ROHYPNOISE Hierb-loco (autoprod) [mèl]
Cette démo à le port de tête altier et une belle allure.
Acheminant doucement ses partitions d’un univers ambiant vers une approche plus expérimentale, proche du Comea du duo Schaeffer-Hampson, Anthony Colas laisse entrevoir de manière radicale ses attentes, la forte personnalité de sa musique… On pense à Main, à Thômas Koner, à Alan Lamb et ses pylônes chasseurs de vents, à Column one… Les lentes phases nous entraînent sur les versants battus par les vents stellaires, de planètes hostiles. Une sombre torpeur dont on n’aimerait pas revenir. Très abouti et conseillé aux lecteurs attentifs de Feardrop.
JJ.

 
 
 
 

ANGIL Summerypy (autoptrd) [mèl]
La précédente production de Mickaël Mottet avaient convoqué toute l’amertume et la beauté bariolée du monde en douze petites pièces intimes.
Ce précédent album mettait déjà l’âme de son auteur à nu, une petite mort dont nous étions les témoins privilégiés.
Ce Summerypy tient toutes les promesses, les espoirs et les défaites que nous avions mis en lui.
La voix nous transporte toujours avec cette même tristesse mesurée dans les confins de nos mémoires. Les arrangements, composés d’une guitare, d’un tambourin, d’une flûte, d’un souffle d’électronique, sont dénués jusqu’à l’extrême de tout superflu et recèlent en eux la plus belle des vertus : l’humilité.
Voyager en compagnie d’Angil, c’est s’offrir quelques minutes de ravissement aux côtés de Matt Ward, de Radar Bros et de Maximilian Hecker réunis. Merveilleux.
JJ.

 
 
 
 

PORCELAIN I’ve got a really important thing to do… (Drunk Dog)
Cette splendide épreuve de leurs travaux récents témoigne, au-delà des qualités d’écriture naturelles, une profonde maîtrise des espaces sonores, de la densité des sections à cordes.
Porcelain cultive, sarcle, laboure et récolte les héritages d’une noisy tortueuse et mélancolique. Leur musique prouve la véracité de l’adage " il n’est pas nécessaire d’être triste pour être malheureux ".
La moiteur palpable de certains passages, l’asphalte froid des suburbs sont quelques traits parmi la foule de caractères qui se bousculent pour désigner leur musique.
De lentes montées rythmiques, imposantes et ascétiques ombragent les ruisseaux de mélodies des fonds de vallées. Puis pesamment, l’auditeur pénètre au cœur des compositions : étendues d’arpèges, tertres ravinés d’expérimentations, vastes plaines mélodiques.
Le "calvaire" que nous inflige Porcelain est un supplice salutaire et cathartique, prompt à nous faire apprécier les beautés cachées de l’obscurité.
JJ.

 
 
 
 

THOMAS HOSANSKI S/t (autoprod) [Mèl]
La pochette met en scène la nuque d’une jeune femme balayée par sa natte encombrante.
Cette petite démo est un régal. Elle transige avec la plus belle des modernités tout en conservant un guide fil avec une musique empreinte de folklores de traditions et de coutumes. Les deux longues plages (autour de 25 minutes chacune) qui assurent l’armature et l’équilibre de ce disque installent un dialogue interculturel avec l’auditeur témoin.
Thomas Hosanski nous entraîne dans une forme simple et physique de derviches tourneurs, l’univers rom, les spirales gitanes, les embruns tziganes et la bohème comme ultime paysage. Superbe.
JJ.

 
 
 
 

POUIC-POUIC S/t  (Bad Sounds/autoprod)
YOUNE Vive la creuse (Bad Sound/autoprod)
Le jeune homme vient secouer l’aristocratie industrielle lyonnaise (ce n’est pas visible au premier coup d’œil chez Bad Sound) à la faveur d’un album Cd-R.
De mauvaises ondes ?! pas vraiment si l’on considère le plaisir et l’épanouissement que l’on prend à l’écoute de cet album. Ça évoque par bribes et échos de l’électronica défaite, des chants bulgares improbables, mêlés à une peaches du pauvre… et ça correspond bien à l’image DIY du label.
Youne, pour sa part, supervise les travaux de fin d’année des beach Boys, de musiques africaines ou de Jaap Blonk. C’est bancal à souhait, ça part dans tous les sens mais on s’en fout un peu… On se prend d’amitié pour ce jeune éphèbe et ses mélodies de fins de soirées, ses montages sur 2 pistes à 4 balles (et non l’inverse) à la Stock Hausen-People like us et on souhaite encore et toujours que Bad Sound conserve sa touche si foutraque et mal agencée… la musique elle, s’en portera tout aussi bien.
JJ.

 
 
 
 

FINALCUT Severe (Autoprod) [Mèl]
Flavien Gillie continue d’approvisionner nos attentes en textures granuleuses et spatiales. De la même façon qu’une pièce dispose de deux faces qui se font dos, les atmosphères que dégage cette démo font le siège autour de deux sentiments/sensations distinctes qui pourraient facilement se traduire par l’apaisement et le tourment.
Des phases compactes, pondéreuses, emplissent avec régularité l’espace, puis graduellement, l’isolation et la tranquillité se développent, émergent de la cacophonie, encadrent le bruit de cette impassibilité sonore. À la fois hydrosonique et cosmique, cette quête acoustique échappe à la table élémentaire des éléments terrestres pour gagner des sphères plus hautes. À rapprocher d’Andrew Duke, de Thomas Köner et d’une brochette de minimalistes égarés entre Meme Rec et Trente Oiseaux.
JJ.

 
 
 
 

PIERRE Greatest hits ! (autoprod.)
Pour les amoureux de la vraie démo DIY, peu soignée aux entournures, cultivant le son dans l’approximation la plus complète et les prises de risque maximum, cette démo est la vôtre !
Ce qu’on apprécie de prime abord chez Pierre, c’est l’indolence avec laquelle il enchaîne les morceaux, une sorte de nonchalance bienveillante qui se livre jusque dans le titre de son album Greatest Hits, compilant pour l’heure l’intégralité de ses compositions… Une guitare sèche, une plume agile pour les textes et une voix traînante, rien de bien sorcier en somme pour se sentir à son aise dans l’univers étroit (les contreforts de sa chambre) mais pourtant généreux de ce jeune homme. Contre la morosité et la culture unique, votez Pierre !
JJ.

 
 
 
 

UN HOMME ET UNE FEMMME S/t (autoprod.) [Mèl]
Au delà du clin d’œil au réalisateur, le groupe semble avoir également fait sienne la technique de roue libre autour des acteurs, qu’il applique consciencieusement à sa musique.
La rythmique tiraille en à pic, les aplats de mélodies virevoltent, les changements de cap nous font tourner la tête.
Difficile de définir exactement leur genre… sur cette démo sept titres, on passe de l’expérimentation de texture façon Deity Guns Sonic Youth entrecoupés d’effets et de samples choisis puis la mélodie vient nous ensevelir… L’étonnante fragilité et gravité qui émane de la voix du chanteur (Dominique A ? Pure ?), vient renforcer les sillons âpres du corps des morceaux. Le texte par moment un peu austère, a la sagesse de se faire discret dans un échange équilibré avec la mélodie .On pense à de jolies choses de chez Prohibition, à certaines vacations de chez Acétone rec. Spontanéité et pudeur.
JJ.

 
 
 
 

MARIA BLONDE S/t (Autoprod) [site]
Maria Blonde œuvre ici à la réminiscence d’un émo-core lucide, racé, pénétrant et d’une power pop énergique et entreprenante, qui nous rappelle inconsciemment au souvenir des Drive Blind et d’autres acteurs de cette scène de l’époque. Une plus grande attention portée à des mélodies ciselées pourra sans doute les faire sortir de l’anonymat. Une épreuve de force qui mérite notre attention et vos encouragements. Proche de Tantrum, Bumblebees ou Dead Pop Club.
JJ.

 
 
 
 

NOLE Radio super relax (Autoprod) [Mèl]
C’est avec un bagage d’arrangements soignés, issus du jazz, de réminiscences électroniques feutrées, d’agencements surannés que vient à nous cette première production du Pictavien Nole. Si l’emprunt à Pierre Schaeffer (son introduction des oiseaux) brouille un peu le jeu, à ne pas s’y tromper, on tient là un fervent admirateur de l’écurie Ninja Tunes, et plus particulièrement d’Amon Tobin ou du Cinematic orchestra. Le morceau d’introduction (Bitum) en étant l’expression (par trop) pure. Pour autant, les compositions suivantes se dégagent plus ouvertement du schéma établi pour laisser filtrer un savoir-faire évident dans la création de textures chaudes, autant qu’un goût certain pour l’expérimentation cinématique, embrassant dans une communion salutaire les ambiances des frères Barron (Planète interdite), Ed Wood et les orchestrations de Lalo Schiffrin. Du très bon cinéma pour l’ourlet de nos oreilles.
JJ.

 
 
 
 

NNECKRA PACKEE Paracelse (Cabine B) [Mèl]
Figure libre de la scène marseillaise, Phillippe Vechionne continue à tisser avec le systématisme et l’absolu ordonnancement d’un prêtre tibétain exécutant un tantra, un réseau de fraternité et de contacts aussi bien nationaux qu’internationaux. Dans une bonne mesure par le biais de son fanzine Asperagus, mais surtout via Nneckra Packée , groupe émo-noise brillant.
Construit autour d’une certaine idée du bruit, le groupe a beaucoup évolué depuis les soubresauts de ses premières démos. Techniquement, il a su trouver son équilibre… l’aspiration à une meilleure production, à un meilleur rendu gagnant à mesure que les compositions se complexifiaient.
Mélodieusement et rythmiquement, de nouvelles influences, une maturité grandissante et une ouverture plus large au monde des sons auront offert plus d’une renaissance : on peut citer pêle-mêle Blond Redhead, Bastard, My Own, Uzeda, Craw, Prohibition, Neurosis, etc. autant d’artistes, d’approches, d’atmosphères qui définissent sans limiter le monde de Nnecra Packé.
Une très bonne démonstration de leur talent condensé sur moins de trente cinq minutes de tension et de raideur abrupte.
JJ.

 
 
 
 

DANIEL PALOMO VINUESA + collectif Serendipity Le projet flou ( Serendipity)
Le projet flou a un malin plaisir à corrompre et plier le brouillard à ses propres intentions. La myopie rythmique, l’astigmatisme mélodique, la presbytie syntaxique, issu d’un travail de recherche conséquent perturbe la vision de l’auditeur... quelque part entre les arrangements de Renaud Garcia-Fonk, du free-rock putassier, de l’électronique bancale , de la soupe populaire et par moment les signatures barrés de chez OHM/Avatar (mais alors de loin).
Les musiciens semblent expérimentés et prennent un plaisir délictueux à pervertir des pans entiers de notre culture populaire à leur vision lubrique de la musique. On a beau ne pas aimer l’étiquetage intempestif, le choix des genres et les techniques sont trop fâcheusement variés, trop rapidement survolés pour permettre de s’approprier un titre, attirer nos oreilles plus d’une écoute.
JJ.

 
 
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