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2002
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2001
Entretiens
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JadeWeb
chroniques #10
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LES
ENTRETIENS
. Bip-Hop .
. Travaux Publics .
. Mathieu Malon .
. Arbouse Rec .
. Active Suspension .
. Osaka . |
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NOONDAY
UNDERGROUND Surface noise (Setanta/ Pias)
Simon
Dine est une forme d’explorateur sonore autant qu’un voyageur temporel ;
sa vitesse de croisière quoique lente, s’est établie depuis
deux albums à la deuxième partie des années 60’ (Self
Assembly visitant l’année 67 et Surface Noise la période
68-69) son plan de vol quant à lui, survole les paysages chamarrés
de la Tamla Motown. Cet album, outre les contributions essentielles qu’il
développe (avec Daisy Martey et sa voix chaude, Francis Reader
également), se doit d’être mis en parallèle avec le
dernier opus de Paul Weller (Illumination) tant les deux hommes ont mutuellement
nourri d’apports intellectuels, techniques et mélodiques leur deux
spicilèges.
Perché
quelque part entre le récent enregistrement de Busy Listenings
les excavations feutrées de Cornershop, George Harrison ou Richman,
cet album dispense de la feutrine musicale au mètre, du molleton
mélodique par pans entiers… la production est juste et le panel
de références (on notera l’excellente reprise des Turtles)
est mesurée… un excellent album automnal.
JJ.
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DENSE
VISION SHRINE Magic & mystery (Iris
light/import )
Il
vous faudra passer outre l’aspect liturgique/sacré et pour tout
dire gothique de la pochette pour apprécier à sa juste valeur
ce nouveau chapitre du label Iris Light, qui par le passé nous
avait offert, entre autres beautés l’album obscur et isolationniste
de Penumbra (Ex- Zoviet France SVP). Pour ceux qui connaissent déjà
l’univers des artistes précités, Dense Vision Shrine ne
fera que conforter leur appétit pour les grèves isolées
balayées par une bruine affilée et cinglante.
Un
univers qui s’accommode volontiers de passages silencieux, de lentes montées
d’orgues et d’un brouillard d’interférences lourdes.
Vous
l’aurez compris, si Magic & mystery n’invite pas à la
déconne et ne dope pas foncièrement l’ambiance, il n’en
reste pas moins que ces six morceaux grandissent et nettoient notre âme
et nous font oublier un bref instant la médiocrité de nos
existences (pas la mienne, la vôtre…).
JJ.
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DAVID
DESIGN From sweden with love (Labrador/Pop Lane)
Si
le concept de cette compilation a de quoi énerver au-delà
de l’entendement, à savoir faire l’apologie et la publicité
d’une marque de design suédoise via une compilation feutrée
et formatée, on doit bien avouer qu’on est vite séduit par
la qualité des artistes et environnements sélectionnés.
On doit cette petite affaire à un DJ répondant au nom de
Olivier Rohrbach, helvétique de son état. La première
partie de la compilation est en tous points excellente, balayant le panorama
éclectique des artistes du pays, une reprise de I new York surprenante
et belle par la diva locale (Monica Zetterlund), un des plus onctueux
titre du grand échalas Johansson, en passant par Tityo, Club 8,
Mondial, dont certains rappellent à notre mémoire les jolies
productions (jolies voix !) du label Jazzland rec.
La
bonne deuxième partie du disque donne un peu moins l’occasion de
s’évader, mélangeant de manière indécise morceaux
excellents et titres passables.
Un
bon point pour le label qui demandera confirmation avec la découverte
d’un album d’artistes à part entière.
JJ.
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PURE
Noonbugs (Mego/Ici d’Ailleurs/Chronowax)
Peter
Votova vient parachever de sa petite contribution le bruit blanc des sous-cultures,
cette " noise music " popularisée vingt années
plus tôt par HijoKïdan, C.C.C.C. ou Merzbow. Avec la patience
et la constance d’une Pénélope, Pure, comme Ab Ovo
manuscrit avec un souci du détail renouvelé des paragraphes
de l’histoire de ce genre musical. L’écriture n’est pas gauche,
elle est fine, ciselée et offre avec le recul, des paragraphes
consistants, aux franges du brouillon, riches de sens pour qui sait y
porter le regard.
Chaos
soniques, fragments bruyants, ondes subversives, fréquences assourdissantes
composent ce Noonbugs, réplique en profondeur d’une exploration
passée (présente sur le 3’ The end of vinyl). Sous
le bourdonnement incessant des batteries d’armes s’esquissent quelques
lambeaux de civilisation : sirène de police, cordes de violons,
comme autant d’échos des illusions que nous avons irrémédiablement
perdues.
JJ.
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KUBIK
S/ (Autoprod./Relax Ay voo) [mèl]
Drôle
de paradoxe que de se nommer Kubik alors même qu’on prodigue
des compositions dénuées jusqu’à l’extrême
de tous tranchants, angles contendants et autres encoignures affilées.
Polonais
de lignage et violoniste d’adoption, Kubik aura su conserver intact à
son souvenir les fiévreux arpèges des mélodies slaves
de son passé : frêles, discrètes et pourtant
pleines de force et de fierté. Avec une belle intelligence, il
aura secondé ses litanies d’une approche véritablement européenne,
héritée du minimalisme de Satie et d’une admirable " transversalité "
digne d’un Moondog. Le résultat est exaltant, on se laisse traverser,
on danse en compagnie de Taraf de Haïdouk et Michael Nyman autour
d’un feu tout en laissant dériver nos esprits engourdis par l’alcool.
JJ.
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ACETATE
ZERO Ground altitude (Arbouse recording/Chronowax)
Acetate
Zero n’est pas de ce genre de groupe, fort en gueule, à exposer
des principes emphatiques sur la musique, à construire l’histoire
sur du vent ou à décrire des formes complexes dans le vide...
Chaque bribe de mélodie, chaque fragment d’arrangement répond
à une nécessité vitale, s’encastrant les uns les
autres avec une harmonieuse complémentarité.
Ces
onze titres sont des gifles à répétitions, une succession
de brises soutenues et vivifiantes qui fouettent sans concessions le visage
et balayent les pensées…
Ground
altitude fait suite à Piece in trouble et comme ces
choses qui ont de la constance, garde en ligne de mire le même objectif
simple et pur… composer la mélodie parfaite…
Ils
ne sont pas loin de l’objectif, et l’étreignent presque à
diverses reprises, que ce soit sur Ascension, First class vacuity,
Milford tack station, Deception island, Taste the tempest,
etc.
Initialement
comparé à Hood, leur travail s’accorde également
à ceux d’autres artistes comme Pan Amarican (ancienne version)
voire des membres de la confrérie Aesthetics.
Acetate
Zero confirme tout le talent qu’il dispense depuis cinq ans et signe ici,
dans le plus beau des styles, un album majeur et hors des modes.
JJ.
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MASON
JENNINGS Century springs (Setanta/ pop lane)
La
balade à laquelle nous convie Mason Jennings est une excursion
bucolique et champêtre.
L’immensité
invite étrangement à l’introspection, comme si l’esprit
humain préférait se replier sur lui-même que d’avoir
à questionner son existence dans l’univers.
Ce
dernier n’a pas son pareil pour mettre à jour les défauts
dans la cuirasse. Ce gentil garçon, qui aurait sans doute choisi
le métier de garde forestier dans une autre vie, vient remplir
les grands espaces vierges de son pays intérieur par l’entremise
de sa voix mi-perchée.
Originaire
de Minneapolis, ce Century springs signe là son troisième
album. L’attitude de ses chansons pourrait se résumer en une longue
et mélancolique complainte sur le ton d’une country folk légère,
par moment teintée de gravité comme sur Sorry signs
ou On cash machines ; une voix dont les trémolos rappellent
Lou Reed, la cigarette et les drogues en moins. Quand les sentiments et
l’élégance se mêlent…
JJ.
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DIAGONALE
STABLE dy10 (Savoir Faire 53) [mèl]
Ce
3 pouces est l’incarnation d’une session enregistrée au blockhaus
dy10 à Nantes ; on avait pu les découvrir à
l’occasion de Blow up, superbe pièce d’une trentaine de
minutes sous influence de défricheurs de la scène électro-acoustique.
À
la différence de ses confrères de même génération,
Diagonal Stable élabore un partage vibrant de ses sources,
à cheval entre une musique abrasive, consistante et fracturée
et une expérimentation insidieuse et sinusoïdale.
La
culture indépendante et la position transversale adoptées
par le duo perlent au fil de ces seize minutes. Les circonvolutions lapidaires
des sons distillés, le timbre spartiate et industriel des bandes,
la part importante laissée aux espace vierges et au silence donne
au morceau une envergure conséquente. Pour les amateurs d’A bruit
Secret, du duo Noetinger/ Marchetti et des jolies productions (certaines)
du label Parisien Pricilia record.
L’art
de l’esquive et de la subtilité.
JJ.
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ANTIFROST
V/A Suffer/ enjoy (Antifrost/Metamkine)
Suffer/enjoy
résume bien le didactisme dont le label hispano-grec se fait le
porte-flambeau depuis plusieurs années. Un plaisir masochiste,
en somme, à expérimenter au-delà des contingences
établies, en offrant à la réflexion un panel d’expérimentations
sonores, pas toujours accessibles, pas nécessairement confortables
à l’oreille, mais invariablement troublantes pour l’esprit. Suffer/
enjoy ne me fera pas mentir puisqu’il synthétise la confrontation
de onze artistes à une figure de style imposée par le label :
restreindre son exploration du son, sa composition dans un registre de
200 Htz. Certains artistes tels que Francisco Lopez, Utah Kawasaki, Zbigniew
Katrkowski ou Coti ont pris le parti de se réfugier dans les basses
fréquences de 0 à 200-300 hertz, alors que d’autres se retrouvent
à l’extrémité du spectre, tels que Jason Kahn (14000
Htz) voir le débridé Kim cascone qui voltige dans les ultrasons
à plus de 17000 hertz. [alors même que les home résidents
du label (Ilios-Yoshida-As11-philip Samrtzis) oscillent dans une gamme
moyenne de bandes.
Si
chacun a pris la mesure du risque, on s’attachera surtout aux titres des
" middle class " qui offrent une plus large palette d’évocations,
de vacations mentales que ceux de leurs acolytes.
Un
travail et une approche ludiques, qui se défendent de toute technicité
ou conceptualisme fumant, à même de donner six bons mois
de travail à votre orthophoniste si vous privilégiez une
écoute répétée.
JJ.
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CORDELL
KLIER Apparitions (Ad
Noiseam/Nuit & Brouillard)
Comment
cerner l’écho d’un glitch, le spectre d’un rythme, la rumeur d’un
bleep ?
De
ces interrogations légères comme le vent, fluides et impalpables
comme l’ombre est né un travail minutieux d’investigation dans
le son. Si l’évanescence et la fugacité parent chacune des
treize compositions d’Apparitions, nous ne devons pas nous y tromper,
Cordell Klier a bien mis en action un important dispositif de savoir
faire adroit, de recherches minutieuses, de sélections féroces
pour engendrer, agencer, en un mot formaliser cet album. Il aura extrait
du précepte " qui peut le plus peut le moins " toute
la quintessence, le substrat pour offrir en ultime analyse les fugitives
silhouettes de rythmes qui flottent autour de notre platine. Ses tentatives
renouvelées sur son label Doctsect, sa furtive contribution à
la récente compilation de Ritournell renforcent notre sentiment
que ce musicien est en passe de se faire un nom aux côtés
de ses pairs, parmi lesquels Akira Rabelais, Tetsu Inoue, John Hudak,
David Gross, Taylor Dupree. Et de nous régaler de cette musique
minimale et hautement évocatrice.
JJ.
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MINAMO/JÔRG-MARIA
ZEGER/I-SOUND + D. RAFFEL
Colour
& pattern (Apestaarje/Metamkine)
Cet
album est le confluent de trois univers contrastés, de trois bras
tumultueux de la musique contemporaine qui sans être proches n’en
sont pas pour autant éloignés.
Minamo,
tout
d’abord, quartet japonais composé de musiciens réputés
de la scène, improvise et développe sur plus de seize minutes
une musique ample, dévolue à l’abstraction électronique,
via une fougueuse technique de collages mêlée à un
minimalisme bon crin.
Le
producteur/DJ new-yorkais
I-sound -dont
la contribution aux récentes errances de To-rococo rot émerge
de ce morceau digital crépitant de micro-événements-
et Daniel
Raffel.
L’apport de D. Raffel se traduisant par un nappage stratifié de
couches de synthétiseur hypnotique. Une invitation à la
narcose.
Jorg-Maria
Zeger,
enfin, membre permanent aux côtés d’Ignaz schick, du trio
d’improvisations Perlonex pour une recherche minimale sur des pièces
de guitares, oscillant entre ossature techno filigranée et poly-rythmie
traditionnelle en provenance d’Asie du sud est.
Le
point commun entre chacune de ces interventions reposant sans doute dans
la fragilité et la quiétude des agencements.
JJ.
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MIMETIC
MUTE Data
sensitive (Parametric)
À
l’instar de ses maîtres à penser ; Bryan Jones (Muslimgauze),
Von Magnet ou Iannis Xenakis ; Jérôme Soudan
ne semble vouloir prendre aucun répit, aucune rémission
à l’acte créatif. Créer, concevoir, enfanter, générer,
autant de verbes pour exprimer le même agissement, le même
élan. Après l’avoir entrevu à diverses reprises,
et pour les meilleurs raisons sur Prikosnovénie et Moloko +, entraperçu
au sein du collectif-label à géométrie alternée
90 % Wasser (où l’on retrouve également Francisco Lopez,
Columne One, Rechenzentrum, Jurgen Eckloff, Afanassi Viebeq, etc.), le
plus allemand des Français revient à ses premiers amours
intestins, la musique industrielle… Il opère une brillante évolution
dans son approche… les climats éthérés et légers
qui se dessinaient sur Négative/Positive ont cédé
le pas à une gravité beaucoup plus palpable, clinique et
compacte… La sensation d’immersion dans un film est ici absolue… les passages
rythmiques, puissants et acérés se construisent autour d’un
travail fin et précis sur les sons. On n’est jamais loin de Blade
Runner, de l’album concept de Column One (Electric Pleasure), d’Elektroplasma
de Norsq , de Nocturnal Emissions, selon les couleurs de la composition.
L‘analogie
entre les mécanismes du corps vivant et les engrenages des machines,
le sang et la graisse, les périodes d’apaisement et de tension
subite trouvent ici un heureux parallèle. Par certains aspects,
les montées rythmiques sentent un peu le daté, je pense
à Schizophrénic, entre autre, qui nous ramène
quelques années en arrière dans l’évolution de la
musique (Indus ? EBM ?), pourtant Jérôme Soudan
trouve une voie de sortie avec des constructions plus personnelle et actuelle
(destructive). Pourtant, c’est sans doute son travail sur les atmosphères
calmes mêlées à des samples qui impressionne le plus.
Un
bon double album avec de très intéressants passages et quelques
ratés, qui gagnerait à tenir une plus grande unité
et peut-être à sortir du paysage électro-néo
industriel dans lequel il aime se maintenir. Avec des remixes de Somatic
reponses, Roger Rotor, Fast foward et Sonar.
JJ.
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PHILIP
SCHEFFNER a/c (Pong/Ici D’ailleurs)
Philip
Scheffner conçoit sa trajectoire, son parcours professionnel,
à la mesure du temps humain, sans impératif de vitesse,
sans chercher à faire sa renommée. C’est sans doute pourquoi
Pong, son label, n’offre à ce jour que deux sorties, en presque
trois ans d’existence. Parce que Scheffner sait qu’il n’est pas bon de
se leurrer, que parfois, un bon album nécessite plus de temps,
plus d’attention que ce qu’il est habituellement admis d’y consacrer.
A/c,
en se sens, apparaît comme le deuxième acte d’une pièce
dont la finalité n’est pas encore rédigée. Il offre
un merveilleux prolongement au préambule qu’était Fon.
a/c
est un journal de bord, un carnet de voyage d’un périple tracé
entre Berlin et Bombay, deux villes multimillionnaires dont Philippe Scheffner
a tenté de saisir la vivacité, photographier le dynamisme,
fixer la réalité… En récoltant et en reportant dans
les pages raturées d’un cahier fragments de vies, éclats
de vérité, simplicité du quotidien, comme cette altercation
grandiose au milieu d’un embouteillage monstre. A/c n’est pourtant
pas a proprement parler le fac-similé de ces deux villes, c’est
une troisième ville recréée de toutes pièces,
fantasmée et agencée par son auteur qui se livre ici à
notre acuité auditive. Un bien beau lieu à même d’enrichir
le dictionnaire des lieux imaginaires d’Alberto Manguel.
JJ.
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TRAVAUX
PUBLICS
V/a Chantier N° 2 "punk Garage" (Travaux
Publics)
Depuis
la dissolution des Ramones, la désagrégation des Dead Kennedy
et de son charismatique interprète Jello Biafra, sans omettre le
suicide commercial des Sex Pistols, le suicide tout court de GG Allin,
on doit bien admettre qu’en matière de punk garage, tout restait
à faire.
Et
ce malgré les revivals pubères d’une presse nationale en
mal d’émotions (The Strokes & consorts) et malgré également
les attouchements verbaux égotistes et narcissiques de Philippe
Manœuvre, pour qui le port des lunettes de soleil sur plateau télé
relève d’une débauche ultime.
Ainsi,
du côté hexagonal, il manquait quelques hymnes heureux aux
plaisirs simples de la vie : se gratter les couilles, ouvrir une
bière avec les maxillaires, pisser sur ses potes, mater l’intégrale
de Steven Seagal… Heureusement pour nous, le plus iconoclaste des labels
français, Travaux Publics, label qui frappe toujours là
où l’on ne l’y attend pas, a gardé à l’esprit cette
facture DIY et a choisi pour cette troisième sortie (faisant suite
aux excellents chantiers Piano Solo et Camping Car) de revisser
soigneusement sa crête sur son crâne perchée.
Sans
faire un retour idiot aux fondements du style, chaque intervenant a puisé
dans sa culture actuelle et sa sensibilité bestiale pour tirer
le meilleur de lui-même (et un peu du pire, forcément). Les
morceaux, expédiés à l’arrache à la vitesse
approximative d’une minute trente cinq défragmentent (sans trahir
ni copier) le patrimoine et l’esprit du Jon Spencer Blues Explosion, des
B’52, de Black Flag, des Stooges, de DHR / Tigerbeat du pauvre, de The
Who, de groupes de riot girls furieuses, de Gonzales en slip à
la Casamance, de sons crades de chez Dischords ou Amphetamine Reptiles.
Des beuglements qui dans nos oreilles prennent des tournures de symphonies
(en rôt mineur).
Avec
Anus Face, Arthur Achpirateur, Big ben, Boogers, Chazam, Nestor is Bianca,
Phonecker, Placido, Présidentchirac, uht, Robert le magnifique,
Rubin Steiner, Karl Marx petroleum, Electroménager, Julien Ribot…
Mention
toute spéciale aux titres de morceaux sévèrement
hilarant [Pizza de merde (tue le monde, tout le monde), Dusty,
dirty, duty, Essorage, La voiture est cassée, jl’emmène
au garage, Des chiens à punk, etc.]. De la chaleur,
de la sueur : qu’on se le dise, le punk n’est pas mort, il bande
encore.
JJ.
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MONTAG
Are you a friend ? (Goom/Chronowax)
Jean-phillipe
Talaga, boss de Goom music, dessine depuis une demi-décennie la
trajectoire nécessairement imparfaite (puisque personnelle) de
sa vision de l’électronique feutrée (ou non) de salon (ou
non), autrement décrit sous le terme électronica. Goom music,
comme d’autres labels (Active Suspension, Clapping Music, Arbouse, Diesel
combustible rec) a su se faire un nom au niveau national voir extra-national
en faisant émerger des valeurs sûres telles que M83, Mils
(qui figurera prochainement sur une compile cocosolid c1t1) ou Purple
Velvet Confusion et à présent KG et Montag
De
toute cette petite fratrie, Montag est certainement le plus timide et
replié sur lui même livrant ici une petite œuvre pour boite
à musique et MO5, pleine de petites sinuosités, de fêlures
discrètes et de mélodies à demi-rêveuses.
JJ.
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T.
RAUSCHMIERE Anti (Hefty/Chronowax)
Ce
qui fait la richesse et la multiplicité d’Hefty, c’est justement
la pluralité de ses approches et des genres défendus, du
hip-hop le plus segmenté à la folk la plus discrète
ou la techno la plus furieuse et son contingent de variantes âpres.
C’est
d’ailleurs dans ce domaine que T. Rauschmiere (alias Marco Haas
qui tire son pseudonyme de la nouvelle de Burroughs Die Tramshiere), échappé
pour un temps du label frondeur ShitKatapult, exerce ses talents. Pour
ceux qui connaissent le label précité on n’est pas à
proprement parler dans le domaine de l’orfèvrerie et des petites
mains ; ici la musique électronique revient à ses fonctions
primaires : faire danser, suer, réagir physiquement par le
biais du rythme pondéral, rigoriste, autoritaire. On pense à
Pan Sonic même si le souci d’exactitude n’y est pas. Une techno
un peu basique qui se cherche entre rigueur minimalisme et exubérance
cadencée. Gagnerait à prendre un peu d’ampleur et de complexité.
JJ.
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COLLEEN
Babies 7’’ (Active
Suspension/Chronowax)
Cécile
Schott compose avec ces trois petits titres échappés de
l’enfance un éphéméride moderne, où fragments
du passé, portions de vie modernes et éléments atemporels
se superposent, s’amoncellent. Résumé à l’espace
réduit d’une chambre d’enfant, la musique de Colleen est
un assemblage éclaté de boucles manipulées lancinantes,
de mélodies cristallines, d’airs sépias et surannés,
de déroulements instrumentaux claudicants, de séquences
délicieusement instables. Comme si Tujiko Noriko, la musicienne
avait croisé les sentiers de Pierre Bastien et Klimperei. Remarquable.
JJ.
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GUITAR
Sunkissed (Morr music/La Baleine)
Mark
Knoeffler représente à maintes égard l’antéchrist
de la guitare (oui, l’antéchrist portait un bandeau en lycra en
moulinant du bras) puisque :
A/ Il
a souillé dans la fange une génération de guitaristes.
B/ Il
a porté l’opprobre sur une génération d’admirateurs
de l’instrument.
Si
ce vieil ado un peu con avait écouté le Sunkissed de
Guitar vingt ans plus tôt, la face du monde en eut été
changée… Problème, Sunkissed sort en 2002.
Les
membres du groupe ont fait baptiser leurs sampleurs et séquenceurs
aux plus beaux arpèges et cantiques électriques de la décennie
passée, depuis low, smog, en passant par le case Bark Psychosis,
Slow dive, Talk Talk sans oublier My bloody valentines et Joy Division
(Spacemen 3 ?)
On
passe ainsi d’une épaisse nappe de nuages stratiformes (à
l’aspect de strato cumulus impénétrables) à des cirrus
plus étoffés, moins denses. La complémentarité
des voix des deux chanteuses nous permet de traverser l’âge de la
femme depuis l’enfance (Ayako Akashiba) jusqu’à la maturité
(Regina Janssen).
La
mélodie virevolte, les jeux de guitare, filtrés par des
sections cordes (violons), traversés d’assauts digitaux brumeux
donnent à cet album la silhouette d’un songe…
La
guitare est ici restituée dans ses merveilleux entrelacs, la variété
de ses arpèges, se jouant même des boucles pour devenir rythmes
et magnifiques vibratos.
JJ.
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END
Science/fiction (Hymen/Tripsichord)
Le
propos central de End est l’art fugitif du sampling, comme essence
même de la musique, ou plus précisément la recontextualisation
des sons et des idées, leur transposition, en dehors du simple
concept esthétique (ou musical).
L’intuitivité ,
l’attractivité, la tessiture splendide qui caractérisent
cet album en font une grande œuvre architecturale, à la fois (a)rythmique,
élégamment symphonique et intimiste dans proportions équilibrées.
La
schizophrénie des périodes de temps forts et de temps faibles
d’un Richard D. James, la profondeur abyssale d’un Third eye foundation,
(lignée Ghost), la puissance eidétique d’un Atom
Heart… sont quelques unes des lignes dominantes, des motifs qui ornent
ce Science/fiction.
Le
caractère futuriste, les éléments d’anticipation
qu’on perçoit dans ce Science/fiction sont loin d’être
les caractères prépondérants de l’album.
Ici,
End oppose volontiers la science, rationnelle, cartésienne, irrévocable
comme les rythmes, beat qu’il installe et le domaine de la fiction, de
l’immatériel, de l’imaginaire, du fictif, qui trouve un écho
favorable dans ces nappes fébriles et obscures en provenance de
régions lointaines et désertiques.
La
texture du son est en tous points remarquable, les climats scarifient
notre apathie avec une vigueur prodigieuse et les infrabasses se chargent
de laminer ce qu’il reste de nous.
Ni
tout à fait dansant, ni tout à fait expérimental,
End fait le grand écart entre les genres et accorde les paroisses.
JJ.
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BATTERY
OPERATED Chase through Non-place (cocosolidc1t1/Limonade)
IDENTIFICATION
Identify (cocosolidc1t1/Limonade)
Le
nom du label, pour le moins surprenant " cocosolidc1t1 ", donne
le droit légitime de s’interroger sur le genre défendu et
la portée réelle des artistes qui s’y exhibent. L’annonce
prochaine d’une compilation où figureront Mils, Gate, Remote viewer,
Richard H Kirk dresse un profil plus précis du label, balisé
entre l’expérimentation atmosphérique et l’électronica
sophistiquée.
La
porte d’entrée est ouverte par Battery Operated (deuxième
production du label), groupe aux origines néerlandaises avec des
figures de style élancées, oeuvrant pour l’acclimatation
de l’expérimental et de l’électronique. On cabote avec une
attention marquée dans les eaux troubles de leurs compositions,
mélange extravagant de minimal techno passé au fouet de
glitch cristallins, de coups de masse brutaux mais chauds. Leur récent
split avec Gescom sur le label Bip-hop donne bien des clés et autres
ébauches de réponses, tant leur musique complète
celle des Anglais. Une association exiguë et baroque de drum n’bass,
de musique concrète, d’ambiante opaque et d’électronica
débridée.
Identification,
pour
sa part, cultive toujours avec le même brio et la même audace
le click & cut cher aux adeptes de mille plateaux. Il convient de
préciser que Identification surajoute des nappes de musiques effervescentes
et rythmées à ce mélange (lignée Anti-pop
consortium/Amon Tobin, Neotropic ou Wagon Crist) donnant à sa musique
un nuancier impressionnant de teintes et de chaleur, à cheval entre
le rigorisme dézingué d’Autechre et la chaude torpeur de
Coldcut.
Cocosolidc1t1
annonce la sortie prochaine d’albums parmi lesquels Pretty Boys crossover,
Identification, Private Benjamin ou Dorkestra… un label à surveiller
de très près.
JJ.
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ALAIN
BASHUNG et CHLOE MONS
Cantique des cantiques (Dernière bandes/Wagram)
On
reconnaît souvent la véracité d’un artiste à
sa capacité à mettre en scène sa propre vie, sans
discernement avec son art. Alain Bashung et Chloé Mons
se sont unis en juin 2001 à la petite église d’Audinghen,
Nord Pas de Calais. Les jeunes mariés ont choisi de célébrer
cet événement à leur façon, en plaquant sur
bande, l’enregistrement de la cérémonie. Ce cantique des
cantiques, revisité par Cadiot et supervisé par Burger est
une œuvre emplie de solennité comme ils savent en créer.
Le discours calme, posé de la mariée, puis du chanteur viennent
se superposer en bas-relief de l’édifice musical construit par
les orgues profond et gutturaux.
Un moment capturé à la vie privée, touchant au-delà
d’un album classique.
JJ.
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BREMSSTRAHLUNG
RECORDINGS V/a Lowercase–sound 2002 (Bremsstrahlung
rec/import)
Lowercase
est né d’un postulat posé par John Cage et enrichi des propos
de Steve Roden [in between noise] sur la transparence du son, les marges
silencieuses de la rythmique, leur nitescence. De ces réflexions
simples et existentielles est né un chantier pharaonique, réparties
sur deux C.D. où figurent les artistes les plus influents de cette
scène, tous continents et pays confondus.
Ce
Lowercase investit la part de vide/prolonge notre quête de
silence, de solitude et d’introspection comme seuls savent le faire Bernhard
Gunter ou Thomas Köner.
Plutôt
que de lister le pedigree de chacun, rappelons les structures / labels
qui ont balisé le parcours des intervenants : Raster Noton,
Ritournel, 12 K, le silence des sirènes, Geometrik rec, Sonoris,
V2, Staalplaat, Table of the Elements, Drone, Sedimental, Pre-feed, Povertech,
trente Oiseaux , etc.
À
chaque artiste présent correspond une fiche signalétique,
sens de l’œuvre, graphique d’oscillations du morceau, comme autant de
profils différents d’un même peuple. L’isolationnisme, la
plénitude… les nano-mélodies et les rythmes " angstrumien "
dessinent en filigrane la translucidité de leur composition, jusqu’au
choix des calques imprimés.
En
un sens, Bremsstrahlung rec touche à la même identité
très marquée du label Japonais Meme. Une " musique
d’ameublement " dépouillée à l’extrême,
parcimonieuse, minimale, acoustique, électronique, conceptuelle…
de très belles choses en perspective, donc…
JJ.
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