Yannick
(Y) | Sébastien (S)
JadeWeb :
Pourriez-vous-nous
rappeler vos parcours respectifs ? Comment vous partagez-vous
la tache au sein d'Osaka ?
Yannick Martin : on fait de la musique
depuis environ 8-9 ans. On avait notre formation respective mais un
soir, après un bon repas, on a chacun pris un instrument. Osaka
était né.
On a l'habitude d'avoir chacun un instrument privilégié ;
les synthés pour Sébastien, la guitare pour moi. On
crée l'ossature des morceaux chacun de notre côté
et on assemble ensuite les idées. Mais toute règle générale
a ses exceptions.
Certaines
de vos productions ont été éditées par
des labels étrangers, (notamment votre dernier album Life for
dead space sur Roisin rec.) Doit-on voir là une volonté
claire de votre part ou n'est-ce le fruit que des coïncidences
et des rencontres ?
Y : Au départ, nous voulions
sortir des disques sur des labels dont l'identité musicale
collait à notre musique. Le déclic fut sans doute la
signature de TANK sur Earworm (un label londonien). On a suivi le
mouvement et envoyé 2 ou 3 CD à l'étranger. Le
fait d'éditer la musique d'Osaka hors de France est à
double-tranchant : si nos disques sont disponibles dans tous
les magasins indés d'Angleterre et sur pas mal de mail-order
américains sur le net, nous ne touchons quasiment personne
en France, faute de distribution en bacs.
Les
groupes français évoluant dans une frange électro-pop
expérimentale (Dat Politics, Gel :,Ultra Milkmaids), voire
atmosphérique ont acquis une certaine crédibilité
hors des frontières. Le ressentez-vous dans vos diverses tractations ?
Y : Il
y a quelques années, peu d'artistes français étaient
reconnus hors de nos frontières. Le point fort de la musique
"électro/experimentale/etc", c'est l'absence de chant, donc
de langue, qui gomme toute référence géographique
et tous les a priori qui s'y rattachent. D'un autre côté,
que serait Programme ou Brigitte Fontaine sans paroles ? Je ne
sais pas si c'est grâce au sentiment "communautaire" de la future
Europe qu'il nous est désormais plus facile d'être touché
par une chanson de Kante ou Tarwater. Parce que l'allemand, ce n'est
pas à première écoute une langue chantante…
Doit-on
voir Color Und Climax comme un projet à part entière
ou un moyen d'expérimenter entre amis ?
Y : CUC
fut un projet bien délimité dans le temps (97-99), dans
l'espace (le salon de Jean Charles, boss d'Active Suspension, alors
brestois) et dans sa conception (enregistrements nocturnes, utilisation
systématique de la reverb et du delay, etc.). Nous avons essayé
de rebâtir le projet en studio mais le résultat -quoique
intéressant- n'a plus la " CUC touch ".
Peut-être un jour réussirons-nous à retrouver
cette jeunesse perdue ?
Sebastien : je le vois plutôt
comme un moyen d'expérimenter entre amis.
Votre
musique m'évoque des passages du Hex de Bark Psychosis,
entre autres jolies choses ; je crois que c'est une de vos références…
Dans cette idée quels albums "mythiques" auriez-vous rêvé
de réaliser ?
Y : The Queen is Dead
des Smiths pour la finesse mélodique, Hex pour l'épaisseur
de la moquette du studio, Karma de Pharoah Sanders pour rencontrer
la transe afro-américaine, mais surtout Technique de
New Order : le résultat est splendide, à mi-chemin
entre la pop et l'électro. Il a été enregistré
à Ibiza, ce qui est très étrange, il n'y a guère
que Fine time qui soit réellement ensoleillé.
S : Les albums mythiques
que j'aurais aimé réaliser- le choix est difficile !
- sont: Ki-Oku de DJ Krush et Toshinori Kondo et Sex and
death de Durutti Column.
Quelle
curiosité ressent-on à voir des morceaux que l'on a
conçu se faire remixer par des musiciens si éminent
que B. Fleischmann ou State River
Widening. N'auriez-vous pas préférés directement
collaborer avec ces formations ?
Y : Nous considérons
la série de maxis plus comme des collaborations que de simples
remixes. Ce n'est pas parce qu'il y a 2000 km entre deux formations
ou que l'enregistrement ne se fait pas dans un lieu unique que le
processus de création est déséquilibré.
S : on est toujours curieux
de voir ce que notre musique peut donner entre "les mains" d'autrui,
et le résultat ici est vraiment positif !
Puisez-vous
votre inspiration dans la littérature, le cinéma expérimental…
Y : Plus
qu'inspiration, on peut parler d'observation. En effet, on aime ce
genre de choses même si elles ne transparaissent pas directement
dans la musique d'Osaka. On a quand même intitulé un
morceau Hartley car il nous faisait penser aux petites plages
musicales des films de Hal Hartley. Là, c'est la musique qui
inspire un film imaginaire…
S : Ce sont évidemment
des sources d'inspiration, mais pas exclusivement le cinéma
expérimental.
Une
mouvance générale se dessine : de nombreux groupes
cherchent à recréer des ambiances cinématiques
(avec en ligne de mire Godspeed you..& co. (groupe Canadien à
géométrie variable exploitant les atmosphères
d’Ennio Morricone dans leurs compositions) La force de l'image tend
à diluer l'impact de la musique. Doit-on y voir un parasitisme
du son par l'image dans une société contrôlée
par le tout image ?
Y : Ouh là, le
débat s'élève. Je ne pense pas que l'image dilue
l'impact de la musique. Que serait Badalamenti sans Lynch ? L'image
me semble être une bonne " clé "
pour s'immerger dans une musique. Et vice-versa.
S : Si notre musique est
" évocatrice " il n'y a pas, pour ma part,
de volonté de créer une atmosphère cinématographique,
ce n'est pas ce qui me motive au départ.
Yannick,
tu es sensible aux graphismes. Quels sentiments portes-tu sur ces
magazines - style Crash, Tecknikart, Jalouse…- qui clament
une certaine vision du design, d'un art de vivre un peu stéréotypé.
Quels travaux apprécies-tu en particulier ?
Y : Tecknikart est OK,
mais à des années lumières de CRASH. J'aime ce
magazine -visuellement du moins- car il prend de bons risques épurés,
qu'y a-t-il de plus beau qu'une page blanche ?... Tecknikart,
ça me fait pouffer tant la branchitude est à la fois
conspuée et sublimée. Jalouse, j'aime bien les
photos de filles. Mais il s'agit plus de voir que de lire ce genre
de presse, non ? COLORS est vainqueur par K.O.
Côté design musical, LA référence est Peter
Saville. Je ne sais pas si les gens s'en sont rendu compte mais comme
tout grand artiste, il a eu ses périodes. On remarque nombre
de similitudes entre ses travaux pour différents groupes à
une même époque. So de Peter Gabriel (86) est
la copie conforme du Low Life de New Order (85), la couleur
vert d'eau et la typographie "Bauhaus" d'Architecture & Morality
d'OMD (81) et de Movement de New Order (81) sont étrangement
similaires, etc.
Pour
tes anciens lecteurs (URSA fanzine), qu'écoutes-tu en ce moment,
qu'est-ce qui t'exaspère ?
Y : Helena Noguerra,
Bomb The Bass/Lali Puna, Donna Regina, Depeche Mode's Exciter, Kobe
(Ndlr : Sébastien en solo), Encre, Manitoba, No-Man, le
nouveau Durutti Column, Melodium, Stephan Micus, Velvet First Floor
(un des projets de Niko de Ma Cherie for Painting), les Clash, Mark
Kozelek, la compil' " Goom Tracks ", Mils, Gel,
Lisa Ekdhal, etc. Ce qui m’exaspère ?! le ska-punk festif
en paquet de douze et le hardcore quand il empiète sur le set
live d’Osaka.
Osaka
| c/o Yannick Martin - 20, rue Amiral Linois 29200 Brest - France
| mèl
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