Chroniques
2001
Entretiens
|
|
JadeWeb
chroniques #10
| GARANTI SANS SERVICE DE PRESSE
|
ELEVE EN LIBRAIRIES ET FESTIVALS EXCLUSIVEMENT
|
|
|
|
|
|
A
la loupe
Winshluss
& Cizo MONSIEUR FERRAILLE .
Richard Corben ALIENS
/ ALCHEMY . HELLBLAZER . BANNER
. THE
HOUSE ON THE BORDERLAND .
chroniques
#9
LA CAGE > Martin Vaughn-James .
HAWAII > Matt Broersma . L'AMOUR
> BSK . BONE
#9, les cercles fantomes > Jeff Smith . DÉPÔT
NOIR/02 > Stefano Ricci
Chroniques
#8
PUSSEY > Dan Clowes . ESCAPO > Paul Pope .
UN CHIEN DANGEREUX #2 > Imius . L'OEIL À
COURTS THÈMES > Didier Progéas . MON POISSON ROUGE
> Capron . TIBURCE #4 > Téhem .
Chroniques
#7
CHE
> Oesterheld & Breccia .
3 > Micol . CLOSE YOUR EYES > Burns .
TOP TEN #1 & #2 > Moore & Ha . BUSCAVIDAS
> Breccia & Trillo . CARNET > Tardi .
|
|
|
|
|
|
|
|
PAUL
A UN TRAVAIL D'ÉTÉ
S'il fallait
choisir quelle est la meilleure bande dessinée parue depuis le
début de cette année, j'hurlerais à la cantonade
en agitant les bras : Paul a un travail d'été. Cet
ouvrage qui fait suite à Paul à la campagne paru
en 1999 chez le même éditeur et qui donne l'occasion à
Michel Rabagliati de développer une bande dessinée
d'inspiration autobiographique -et oui, encore- d'une sensibilité
confondante de fraîcheur. Dans ce nouveau et imposant volume,
l'auteur nous raconte l'été de ses 18 ans et son passage
de l'adolescence à la maturité. Tout se joue dans un camp
de vacances d'été pour enfants à problème
où Paul remplace, à la demande d'un de ses amis, un animateur
qui s'est désisté. Pas très sûr de lui et
encore couvé par ses parents, le voilà parti au bord d'un
lac perdu en pleine forêt -l'action se déroule au Canada-
avec une bande de joyeux déconneurs à peine plus âgés
que lui mais visiblement bien plus débrouillards. Pendant les
deux mois du camp, les groupes d'enfants se succéderont et à
leur contact, avec la responsabilité que cela implique, Paul
se fera une raison et arrêtera de se regarder le nombril. Cette
histoire très simple puise dans les souvenirs de l'auteur avec
certaine nostalgie -celle également du premier amour de Paul-
et se révèle légère et fragile, fragments
d'un passé dont on ne garde que les moments forts au fond de
sa mémoire. Un livre extrêmement attendrissant, dans lequel
Michel Rabagliati accentue encore la densité émotionnelle
par un étonnant retour au présent de la vie du personnage
dans les dernières pages. Il boucle ainsi la boucle de ses secrets,
en compose d'autres, transmettant à sa fille la clé du
lieu où il a scellé ses 18 ans. Cette importance de la
temporalité, abordée tragiquement par David B. dans L'ascension
du haut-mal et humoristiquement par Blutch dans Le petit Christian,
Michel Rabagliati la présente sans spécificité
de genre, comme un retour sur soi pleinement accepté, ouvert
aux autres, un simple canal passant de sa propre enfance à celle
de sa fille. On évoque souvent Journal d'un album, Livret
de phamille ou Ciboire de Criss pour parler de l'autobiographie
en bande dessinée, dorénavant, il faudra faire une petite
place pleine d'affection pour Paul a un travail d'été.
JP.
PAUL
A UN TRAVAIL D'ÉTÉ | Michel Rabagliati
152 pages | 19 EU | éds. La pastèque [site]
ISBN 2-922585-08-5
|
|
|
|
|
|
MERCI
BEN LADEN !
Mais
surtout merci à Willem pour son implacable acuité
et son regard définitivement critique qui, jamais, ne le fera hurler
avec les loups. Démonteur obstiné des vendeurs de rêves,
même au prix des pires cauchemars, Willem continue de mettre dos
à dos tout ceux qui se tiennent par la main pour leur plus grand
profit. Désespérant et hilarant, Merci Ben Laden !,
qui regroupe des dessins de presse parus dans Libération
et Charlie-hebdo, en met plein la gueule à tout le monde
et retrace en 84 pages l'odyssée permanente de la course à
la domination, chacun avec ses armes. Affreux, cynique, mais tellement
vrai.
JP.
[mèl]
| MERCI BEN LADEN ! | Willem
84 pages | 3,85 EU | éd. Les requins Marteaux
ISBN 2-909590-70-4
|
|
|
|
|
|
|
ECLIPSE
C'est
l'histoire d'un braquage qui tourne mal. Quelques adolescents, une fille
et trois garçons, à l'allure franchement gothique décident
de profiter de l'éclipse de l'été 1999 pour se faire
la caisse du magasin du vieux Matheson. Mais voilà, quitte à
aimer jouer avec la mort autant le faire avec style. On prend quelques
pilules, quelques armes, on attend l'éclipse et hop, on fonce.
Sauf que l'un d’eux perd le contrôle de lui-même et dégomme
tout le monde !
Mais tout ça,
en fait, on s'en fout un peu, on ne l'apprend que par bribes au fil du
récit. L'important est ailleurs, l'important est leur rencontre,
l'attirance qu'ils éprouvent pour leur part d'ombre, le jeu avec
leur propre vie. C'est ce que confirment les deux premiers récits,
muets et énigmatiques, du recueil Éclipse. Soit trois
jeux avec la nuit en plein jour, éclairés de références
musicales aux tons sombres (Normal Loy, Xymox, Christian Death, Pales
saints...). Anton6, son auteur, explore une certaine idée
du romantisme dark, chère aux années 80, d'amours effleurés
et de spleen glacial. On se cajole l'oeil par l'élégance
du trait -où pointe encore de façon insistante l'influence
de Dave McKean- de ce premier recueil qui pourrait augurer de bien belles
choses. Un jeune auteur à suivre, donc.
JP.
|
ÉCLIPSE
| Anton6
28 pages | 4,5 EU | éd. Égone | [site]
ISBN 2-9516259-2-8
|
|
|
|
|
|
|
|
FUZZY
LE LAPIN ET SES COPAINS
Il n'y a pas à dire, enfin si, répétons-le quand
même, les éditions Cornélius sont en train de nous
concocter, l'air de rien, l'édition définitive de Robert
Crumb. Définitive au titre de sa pertinence et de sa beauté.
Le quatrième volume, Fuzzy le lapin et ses copains compile
des travaux dans le genre animalier. Les oursons trognons, Fuzzy le lapin
ou encore Patricia Pig vivent, sous des airs de cartoons, l'aventure
du coin de la
rue, voire de non-aventures absolues par le choix des personnages qu'ils
représentent, entre petite bourgeoisie insipide et beatniks accablés
par l'ennui. Et Crumb se penche sur eux avec amour, en fait le canal d'anecdotes
que l'on sent vécues et se montre toujours passionné par
la tendresse -et souvent la cruauté- dont il les vêt. On
est, toujours à l'image des dessins animés, dans un univers
de la débrouille -la quête de la nourriture, l'agressivité
du milieu, l'amitié, le refus des règles- mais qui n'aurait
pas été spolié de son réalisme social et c'est
là où Crumb prend toute sa force : l'universalité
absolue de ces comptines dans des formes désormais rétro,
dans une oeuvre désormais intemporelle.
JP.
FUZZY
LE LAPIN ET SES COPAINS | Robert Crumb
96 pages | 19 EU | éd. Cornélius
ISBN 2-909990-70-2
|
|
|
|
|
|
|
|
GIBOULÉES
Chaque nouvel ouvrage confirme la pertinence du travail de Vincent
Vanoli tant sur la forme du récit que sur les thématiques
abordées. Le revoici dans un registre où, décidément,
il excelle : le récit sans parole. Giboulées est
une vrai merveille d'histoire onirique où les personnages s'entrecroisent
et se passent le relais de la narration de loin en loin.
Vincent Vanoli est avant tout un auteur profondément engagé
qui choisit souvent ses principaux personnages parmi les plus basses classes
sociales. Pour le cas de Giboulées, sont mis en scène
une vendeuse au statut précaire, un facteur, des personnes du monde
du cirque et des marginaux vivant dans cabane perdue au milieu d'un marais.
Au delà de ces scènes de vie réalistes et touchantes,
l'auteur plonge, comme souvent, son récit dans l'onirisme avec
le parcours d'un représentant en pharmacie -fil conducteur du récit-
dont la vie se trouve bouleversée par une série d'évènements
incroyables : sa voiture se transforme en carrosse, lui-même par
la suite sera réduit à une taille lilliputienne par un mystérieux
docteur, c'est ensuite un magicien de cirque qui le fera apparaître
tour à tour sur un cheval, dans la cage d'un tigre pour finalement
le perdre dans la nature. Des personnages manipulateurs, souvent issus
des classes aisées, tirent des ficelles dont le sens profond nous
échappe, l'injustice est la dure loi qui poursuit les protagonistes
principaux, les poussant les uns vers les autres, dans la solidarité
les exclus. On retrouve les thématiques d'un Pasolini ou d'un Tarkovski,
accordant l'innocence et la grâce aux gens de peu de biens, vivant
en accord avec la laborieuse réalité : seules les personnes
simples n'ont pas l'âme corrompue semble le canevas moral de l'oeuvre
de Vincent Vanoli.
Le livre est porté par la maestria graphique qu'on connaît
de l'auteur et son étonnante palette de gris texturés parsemée
de clins d’oeil à la peinture de la première moitié
du 20e siècle, Max Beckman en tête. Politique autant que
poétique, Giboulées, à la suite de L'usine
électrique ou de La comète affirme Vanoli comme
l'un des plus grands auteurs de la bande dessinée contemporaine,
à la fois porteur d'une oeuvre décalée et subtile,
profondément humaine et étonnamment originale. La collection
"Cotelette" de L'association avec son format original et le très
beau papier intérieur met d'autant plus en valeur cet ouvrage,
définitivement excellent.
JP.
GIBOULÉES
| Vincent Vanoli | [site]
176 pages | 19 EU | éd. L'association
ISBN 2-84414-096-3
|
|
|
|
|
|
|
|
MELEK
INTESTINE
Petit éditeur encore peu connu de ce côté-ci de l'Atlantique,
L'oie de Cravan explore autant l'image, la poésie que la bande
dessinée. On peut maintenant le découvrir ici, en librairie,
par sa production liée à la bande dessinée. En l'occurrence
sortent ce mois de juin deux titres tout à fait représentatifs
de son approche éditoriale, croisant les genres et réalisés
par deux auteurs ayant déjà une certaine reconnaissance
: Julie Doucet et Simon Bossé. Avec Melek,
Julie Doucet compose un livre d'illustrations faites en gravure à
partir de photos de famille trouvées à Berlin dans une poubelle.
Portraits des années 60/70, à en juger par les vêtements
et les coiffures, sourires d'inconnus. Avec Benoît Chaput, elle
donne un lien, une histoire à ces images, raconte un fragment de
vie d'une femme, souvent représentée sur ces images et qu'elle
nomme Melek. Un travail sur la mémoire, sur des instants de vie
dont on ignorera -au même titre que les auteurs- le devenir.
De
son côté, Simon Bossé, dont on était sans nouvelles
depuis la collection Taureaux des îles propose Intestine,
curieuse histoire muette sur un personnage tentant d'échapper à
des petits démons dans un Montréal désertique et
lugubre. On semble naviguer dans un rêve brutalement interrompu
par une fin tragique qui tombe comme un couperet et l'occasion de redécouvrir
les univers décalés de cet excellent auteur. Les deux ouvrages
bénéficient du très beau travail d'édition
de L'oie de Cravan comprenant de la sérigraphie, une couverture
sur papier Rives et beaucoup d'attention accordée à la maquette.
JP.
| MELEK
| Julie Doucet [interview]
& Benoît Chaput
48 pages | 17 EU | éd. L'oie de Cravan [site]
ISBN 2-922399-15-X
| INTESTINE
| Simon Bossé
48 pages | 13 EU | éd. L'oie de Cravan
ISBN 2-922399-16-8
|
|
|
|
|
|
|
|
HELLBOY
#4 Les germes de la destruction
Hop, revoilà notre gros nounours favori ! Avec Les germes de
la destruction, ce sont les origines d'Hellboy qui nous sont proposées
par Mike Mignola. Comme d'habitude, ça décoiffe un
max, déjà par l'ambiance -gothique et explosive-, encore
par l'exubérance de l'intrigue -dans la droite lignée des
romans scientifiques falsifiés très à la mode dans
les années 50-, et toujours par la pureté et l'élégance
du trait et des compositions de cet auteur fascinant. Tentant de ramener
à la surface de la terre une entité démoniaque et
évidemment maléfique (mais dit de façon bien plus
crédible que par la bouche de Bush Jr.), un sorcier carrément
vilain pas beau ne cherche rien moins que présider à la
chute de l'espèce humaine. Mais bon, comme c'est le quotidien d'Hellboy,
qui au passage n'oublie pas d'occire
quelques crapauds
de trois mètres de haut à la langue empoisonnée,
on commence à ne pas trop s'inquiéter... Sauf que voilà,
c'était un piège que de faire venir Hellboy et son équipe,
plus là pour servir de carburant à la vilaine bébête
qu'autre chose... Enfin bon, du comics à fond les ballons, mais
avec Mignola aux commandes, on entre quand même dans une autre dimension.
L'ambiance horrifique met vraiment mal à l'aise et on ne se lasse
pas des magnifiques couleurs de Mark Chiarello. John Byrne vient donner
un coup de main au scénario, bref, on est parti pour 128 pages
de bonheur avec quelques histoires courtes en prime sur la genèse
du personnage et une mini-galerie où s'illustrent Arthur Adams
et Fred Blanchard. Un bien beau livre comme c'est pas souvent.
JP.
HELLBOY #4 - Les germes de la destruction
Mike Mignola, John Byrne & Mark Chiarello
128 pages | 13,95 EU | éd. Delcourt
ISBN 2-840055-750-9
|
|
|
|
|
|
|
|
JÉRÔME
D'ALPHAGRAPH #1
Encore une bonne surprise que le dernier ouvrage de Nylso. Il bénéficie
de la dynamique instillée par la librairie Alphagraph à
Rennes qui fédère un collectif d'auteurs au sein d'une mini-revue
hebdomadaire intitulée Chez Jérôme comix, opuscule
où il a été prépublié. Déjà
reconnu pour ses travaux au sein de la petite structure d'édition
Le simo et pour ses personnages de chats, Nylso explose véritablement
avec cet ouvrage frais et aérien, optimiste et revigorant. Jérôme
d'Alphagraph retrace le parcours d'un jeune homme qui veut devenir
libraire -ce qui déjà nous change grandement des intrigues
passablement faisandées qui font le quotidien de la bande dessinée-
et trouve une place d'apprenti chez un vieux libraire bougon dans une
ville onirique qui emprunte autant à Rennes qu'à une petite
bourgade égyptienne. Le petit Jérôme, qui vit dans
une roulotte avec un âne assez bavard, a un maître spirituel
qui apparaît dès que l'on fait appel à lui et pratique
des rites magiques. Nous voici de nouveau au coeur d'un monde animalier,
teinté des souvenirs et des espérances du futur libraire
et du talent de narrateur de Nylso. Le ton juste des dialogues, l'inventivité
des situations et la sobriété du trait de l'auteur, tout
en finesse et légères hachures font de la lecture de l'ouvrage
un pur moment de bonheur. On pourra rapprocher le graphisme de Nylso de
celui des Fred, Forest, F'murr ou encore Wasterlain auquel on ajoutera
l'audace des compositions de pages et les choix de vues des scènes
où les personnages, souvent représentés en tout petit,
parcourent les pages dans le dédale des cases. Un livre apaisé
et apaisant et, après le Hawaï de Matt Broersma, un
nouvelle très bonne idée des éditions Flblb. Indispensable.
JP.
JÉRÔME
D'ALPHAGRAPH #1 | Nylso
80 pages | 13 EU | éd. Flblb [site]
ISBN 2-914553-15-3
|
|
|
|
|
|
|
|
PSYCHOPARK
#1
Comme il faudra bien se résoudre à faire une croix sur Calvin
et Hobbes dont la fin, vraisemblablement définitive, est toute
proche et déjà consommée de l'autre côté
de l'Atlantique, autant se faire une raison d'entrée et voir ce
que l'on pourra se mettre sous la dent de bien consistant du côté
des strips, dont il faut bien reconnaître l'écrasante supériorité
de la production anglo-saxonne. Et hop, c'est les éditions Vents
d'ouest qui décrochent le cocotier et secouent la timbale avec
la traduction de l'excellentissime Liberty Meadows de Frank
Cho, rebaptisé Psychopark pour l'occasion. Soit Brandy,
psychologue pour animaux, à la plastique affriolante, Franck, vétérinaire
névrosé, timide et malingre et la cohorte de convalescents
dans ce psychopark pour animaux dépressifs : Dean, le cochon toxicomane,
Leslie, la grenouille hypocondriaque, Ralph l'ours nain taciturne ou encore
Truman, le caneton trouillard, etc. Ne cherchons pas d'intrigues, Liberty
Meadows se compose comme la plupart des séries de strips, simplement
d'une suite de thématiques passées
au crible et à la moulinette par les personnages mis en place par
Frank Cho. La verve graphique de l'auteur paraît insensée,
il sait tout faire et brille particulièrement dans la palette d'expressions
dont il affuble ses personnages au fil des situations. Psychopark
est complètement loufdingue, à la mesure des pathologies
des animaux qu'il abrite et l'on est parti pour quelques années
de franche rigolade. On jettera un voile pudique, puisque maintenant c'est
de toute façon trop tard, sur la mise en couleurs de l'éditeur
français qui, une fois de plus, cochonne l'œuvre originale pour
les raisons mercantiles habituelles (couleurs = meilleures ventes). Le
tome 2 est d'ores et déjà prévu pour septembre prochain.
JP.
PSYCHOPARK
#1 | Frank Cho
96 pages | 12 EU | éd. Vents d'ouest
ISBN 2-7493-0014-2
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|