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Chroniques de Julien Jaffré
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CHRONIQUES #15

> GROWING 
(KRANKY/ SOUTHEN)

L’activité de Growing suit le cycle court des saisons puis des années puisque The soul of the raimbow and the Harmony of light fait suite de peu à the sky’s running into the sea d’une année écoulée.
On retrouve cette même expression froide, cette alliance de bleu et de blanc tendant vers le gris, cette inclinaison prononcée pour les univers éthérés et fluides, horizontaux.
Le monde de Growing (Kevin Doria, Joe Denardo) semble s’être teinté de couleurs iridescentes , de détails fugaces et périssables qui bien que contenus, composent une profondeur aux partitions de ses titres.
Un album divisé en 4 titres qui comme sur le précédent album semble vouloir indiquer, à la façon des saisons, une révolution en cours où seul l’hiver et l’automne alterneraient.
Disposés en strates successives, les sédiments de la composition (nappes de guitares, feed back, waves of delay, bruit de basse, alluvions de samples) en se chevauchant, font naître une mélodie désincarnée, liquoreuse, transparente qui donne l’impression d’être en suspension.
La musique de Growing prolonge dans le domaine du son, les phénomènes d’aurore boréale, sorte d’iridescente de la lumière et d’aspiration à la contemplation. Toute la beauté statique du monde.

> ILIOS  Encyclopedia –RW
(Antifrost/ Metamkine)

Cet album de re-mixes et de de-mixes selon la terminologie adoptée fait acte d’une double célébration, symbolisant les 10 années d’existence du label et également la vingtième production de ce dernier.
L’occasion pour ce label grec exilé pour partie à Barcelone de présenter l’étendue de son patrimoine et la diversité des filiations qu’il n’a eu de cesse de dresser entre les genres et les sphères. Jugez-en plutôt : Jazz Kammer, Francisco Lopez, Mattin, Leif Elggren, Alexei Borisov, Anton Nikilla, Marc Behrens, Jason Kahn, Nishide Takehiro, Anla Courtis, Panos Ghikas, Daniel Menche, Zbigniew Karkowski, as11, Joe Colley, Coti K, etc…qui au-delà des pays dont ils sont originaires évoquent surtout la profonde alchimie créatrice internationale qui bouillonne au sein des labels indépendants, dont fait indiscutablement partie Antifrost.
L’album, ça ne surprendra personne se révèle un kaléidoscope des variétés de genres qui de l’expérimentation sonore au minimalisme le plus lactescent, de l’improvisation aux contrées du bruit blanc et de l’inclinaison électro-acoustique chemine dans les ravines escarpées des musiques " expérimentales " offrant une investigation des musiques contemporaines
On notera les très belles pièces de Francisco Lopez, Ilios, Anton Nikillä (hommage à moderne talking ?) entre autres participants et on se ravira de l’existence de ce label qui porte haut et loin la pluralité et la dissidence créatrice.

> YANNIS KYRIAKIDES/VEENFABRIEK The thing like us
(unsounds/Metamkine)

Ce disque traite pour une large partie de la dé-territorialité et des leurres du réel.
Les émotions trahissent souvent les lieux, en surimposant à la réalité des strates d’affectifs, des couches de sentiments, d’émois qui modifient profondément la réalité des lieux. Ce disque construit autour d’écrits de Spinoza sur ce thème ; l’ idée sensible " de ne pas être là où l’on semble être " trahit le schisme du corps ancré à la géographie d’un lieu et l’esprit délivré des frontières spatiales.
Réalisé entre Anvers et La Hague, dans le cadre des productions de Veenfabriek, ce disque construit en 2 parties de 48 " mouvements " chacune, laisse une part à l’interaction entre voix, manipulations électro-acoustique discrètes , et effets électroniques . Tour à tour architecturales et paysagères, les arabesques sonores nous transportent du domaine de l’intime aux grandes contrées pastorales. Le timbre de Carola Arons et celui de Bert Luppes alternent entre discours et chant au long de l’album.
La disque est une plongée insolite au cœur des émotions, chaque variation du morceau trahissant une gamme de sensations (Amour, aversion, devotion joie, pitié, etc…) et ce, élaboré autour d’une harpe, de percussions, de voix et de procédés électroniques.
De la gamme d’émotions ici exposée, c’est sans doute le désappointement qui conviendrait le plus à notre situation d’auditeur. Le disque est une sorte de télescopage de musique médiévale ou féerique façon Prikosnovénie (Daemonia Nymphe, Fleur, Collection d’Arnell Andrea) de la BO de Planète interdite et d’ambiance à la 4AD.
Un sextet composé de Ayelet Harpaz, d’Anne Falbourn, de Tatiana Koleva, de Carola Arons de Bert Luppes et de Yannis Kyriakides en chef d’orchestre numérique. Bizarre, hélènique et baroque.

> MINIT Now roght here
(Staubgold/La Baleine)

Staubgold continue à convier à sa table les réflexions les plus audacieuses autour des mixions de travaux électro-acoustiques et d’expérimentations digitales.
C’est ici le cas pour Minit, qui s’ingénie à fragmenter des mélodies en les noyant dans un vortex de boucles hypnotiques et d’harmonies psychotropes .
Proche de l’esprit des drones et des Loops, la confrontation rapproche leurs démarches des courants psychadéliques des années 70’ incluant au passage les attentes de groupe tel que Faust, Neu ! Popol Voo. Résurgence des aspirations des groupes allemands de cette époque, Jasmine Guffond et Torben Tilly ont su galvaniser la texture étirée de leurs constructions avec des attentes plus contemporaines, telles que le besoin d’isolement, de retranchement au monde, laissant la technologie prendre le pas sur les derniers titres, en recréant un univers organique et désolé.
Le résultat offre un univers riche d’espaces et d’apaisement, de silences et de fébriles variations, mêlant tournures du passé et instrumentations avant-gardistes proches de formations de chez Kranky, Roy Mongomery et Charalambides en tête ou des projets les plus évanescents de chez Constellation voire The Loop Orchestra
Quand Spatialité et liturgie se donnent la main en 4 variations splendides.
www.staubgold.com

> THE GO-FIND Miami
(Morr Music/La Baleine)

Anvers, jolie ville aux façades ordonnancées tient pour symbole un jeune garde dans une position stylisée en train de jeter à l’eau la main du géant terrassé qui terrorisait la ville.
A présent lorsqu’on pensera à Anvers, en plus des diamants, nous viendra subitement à l’esprit Dieter Sermeus [ The Go-Find] et son doux timbre.
Miami semble guidé par un feeling inconscient de nonchalance, une ligne de crête mélodique pleine de rotondité et de petites déclivités, de points de vue splendides et de haltes méritées. The Go-find parfume les lieux et les pièces de ses petites compositions enivrantes et entêtantes.. popsong légère et sans prétention qui emprunte aux univers de Phoenix et de The Notwist, quelques lignes de guitares aux Cure, et un esprit low-fi électronica contemporain façon Fourtet.
A la manière de son homonyme géographique, c’est bien l’esthétique du vent caressant les palmes des palmiers-dattiers qui prédomine au fil de ces 10 titres.
Du soleil , du sable et l’océan Atlantique en ligne de mire. Une petite éloge de l’évasion.

> MICHAEL J SCHUMACHER Stories
(Quecksilber/La Baleine)

Alors que Charles Ives plaçait ses orchestres aux sommets de montagnes environnantes pour créer des concertos uniques , Michael Schumacher s’attache quant à lui à l’architecture des lieux et des espaces, en proposant des concerts simultanés comme ce fut le cas pour Room Pieces in NEW YORK, notamment. Il continue à explorer des échantillons de vies, à l’instar d’un Altmann et ses " Shortcuts " sur ce nouvel Album
Il pratique ici son art en filigrane, préférant l’ombre à la lumière, les collaborations de traverses aux projets solistes; Stories est l’évocation de parcours de vies, d’instantanés d’existence qui se croisent et se décroisent dans un lent processus de maillage social (et par extension musicale).
Les compositions trouvent ici la guitare préparée de Schumacher comme ossature centrale, colonne vertébrale des agencements autour de laquelle se développe une niche biologique de petites sonorités, grésillements inconstants, bourdonnements capricieux.
La somme de détails sonores qu’on emmagasine au fil de cet album évoque la foule de petits événements que nous restitue notre cerveau après une journée de labeur.
Musique savante par instants, envrionnementale à d’autres moments, l’environnement sonore de ce disque, proche des attentes de labels tels qu’OHM AVATAR, met en branle l’énergie de nombre de musiciens, parmi lesquels Tim Barnes, Anthony Burr, Charles Curtis, Jene Henry, Nisi Jacobs, Donald Miller, rebecca Moore, Charles Morrow, Peter Zummo.
Un microcosme inventif et exigeant.

> MILOSCH
(Plug Research/La Baleine)

En premier lieu, cette pochette, qui évoque sans coup férir les cut-up d’images bancales de Stuntman 5 et dans laquelle on décèle un peu de la philosophie et de l’ossature de sa musique, tour à tour fébrile et compacte, instable et bien ancrée dans la mélodie.
Un voile translucide de petit événements rythmiques saupoudrés d’un gaufrage d’électronica et de nappes d’électronica…la démarche est douce, parfois lisse à la façon des voix vaporeuses qui traversent les titres do you like me this way, Frozen Pieces, etc..
Plug Research nous a déjà habitués dans un passé récent à l’accueil d’artistes similaires mais la rotondité des morceaux, et la production trop soignée enferme les morceaux dans une attitude sage et presque bonhommique qui lasse rapidement. Sans grand intérêt.

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