| Jadeweb : 
              Une petite genèse de la revue Le Polème ? Quelles motivations 
              ont concouru à sa création ? Sharl 
              Hot Ganache : Layo (par ailleurs chanteur dans le duo LW, formé 
              avec John Marron / violoncelle) m’a proposé de fonder avec lui et 
              deux autres une revue de poésie. Le premier numéro est sorti en 
              janvier 2000. Les motivations étaient de présenter des textes contemporains, 
              de diffuser un peu nos écrits, de pouvoir accueillir parfois un 
              invité, de faire une revue en groupe (c'est-à-dire dans le choix 
              des thèmes, des orientations, des sélections, des invités, de la 
              diffusion), de faire quelque chose de régulier (il y a eu 10 numéros 
              de cette première série, en trois ans) que les gens attendaient, 
              et de proposer quelque chose de gratuit à 1000 exemplaires (ce qui 
              incitaient beaucoup de gens n’ayant pas accès naturellement à la 
              poésie à prendre un Polème et le lire, et pour finir son côté véhiculaire 
              et non précieux (comme un magazine qu’on lit un peu partout et qu’on 
              n’hésite pas à refiler à d’autres).
 L’orientation 
              a été toute autre pour la création de la seconde série, nous avions 
              envie de changer, d’augmenter les possibilités techniques, de faire 
              rentrer le Polème dans le catalogue du label et donc de proposer 
              un objet… et on a vendu le Polème !
 Arrives-tu 
              à concilier passion de la poésie et ferveur de la musique ?Oui 
              facilement. La poésie m’a vite amenée à la musique et l’une et l’autre 
              ont toujours évoluées en relais et en reflets, c'est-à-dire directement 
              ou indirectement complémentaires l’une de l’autre.
 Les 
              projets dans lesquels tu évolues semblent distincts même si récemment, 
              autour d’un de tes side-projets Breezy Temple, il me semble, il était question 
              de  poésie ? Nous 
              nous sommes essayés aux débuts de Rroselicoeur à de la voix (à partir 
              de mes textes), mais notre évolution nous portait inéluctablement 
              vers la musique "instrumentale".
 La 
              seconde tentative (pour ma part) de croisement poésie/musique est 
              bien Breezy Temple (mais là avec des textes d’auteurs anglo-saxons) 
              et dans une perspective de "chanson".
 La 
              troisième est l’accompagnement sonore que j’aime faire pour des 
              lectures  (de mon camarade Layo ou d’autres). Là encore c’est très 
              particulier, la musique étant sensitive et la lecture plus mentale, 
              c’est un chemin de crêtes…
 Et 
              le 4e n’existe pas mais j’y pense, il s’agirait de travailler à 
              un disque. Je réfléchis simplement à savoir si cela serait plutôt 
              du domaine d’un numéro de ‘Polème auditif’ ou bien d’une nouvelle 
              série du label consacrée, à l’inverse des champs du Cyclotron pour 
              les musiques instrumentales, aux lectures, à la voix, au texte sonore 
              et ou la musique pourrait apparaître en second plan…
 Petite 
              parenthèse. Comment évolue le Label PS ? Comme 
              tout les ensembles ou mini ensembles, Partycul System vit au rythme 
              de sa direction. Je suis seul depuis l’année passée, cela n’a pas 
              changé le cap, que j’assumais déjà avant. C’est Rroselicoeur qui 
              nous fédérait et nous avons mis le projet en stand-by après notre 
              3è album et la tournée de mars-avril. Nous restons en contact mais 
              chacun voulait se libérer du temps pour quelques activités rentables, 
              les Partyculiers comme les autres ne vivant pas uniquement d’amour 
              et d’eau fraîche… MissMoon s’est également retirée de la direction, 
              mais elle continue à conseiller et aider régulièrement. Nous n’avons 
              pas, par volonté, de principe simple et unificateur, bien au contraire 
              nous sommes en permanence dans l’écartèlement entre des sensibilités 
              et des choix (de la poésie à la musique intrumentale), c’est passionnant 
              mais c’est aussi parfois une difficulté supplémentaire.
 La 
              nébuleuse vit toujours, et j’essaie de relier les fils invisibles. 
              Les sonorama (soirées musique et poésie) sont apparus. Nous avons 
              sortis la saison passée Guinea pig (maintenant Optophone), Le Polème 
              #1,  Breezy Temple, puis le Twin Powers #2 cet été… et nous venons 
              tout juste de recevoir les digipack de navel, des génies du rock 
              planant venant de Stuttgart (les premiers Partyculiers germaniques).
 Les 
              Prochaines Sorties envisagé ? Y-a 
            t’il dans le projet Polème, une démarche délibérée de démocratisation 
            de la poésie ?La 
              prochaine sortie sera un recueil de Layo (poésie), ce sera la première 
              fois et c’est assez passionnant de travailler sur ça, et hélas pour 
              la suite… tout est aussi incertain que mon interdit bancaire est 
              proche.
 Disons que c’est quelque chose qui nous touche mais je n’aime pas 
            trop ce mot.
 La 
            première version du Polème était clairement dans cette optique. La 
            seconde, étant vendue et tirée à seulement 350 exemplaires, nous savons 
            que ce sont essentiellement les aficionados des livres d’art et des 
            revues poétiques qui les liront…
 Les 
            soirées sonorama sont réalisées dans un état d’esprit de transversalité 
            assez simple, le rock et la poésie étant à bien des niveaux des expressions 
            jumelles.
 La 
            démocratisation est le fait de « mettre à la porté de tout le 
            monde », c’est pourquoi je n’aime pas ce mot car s’il n’est pas 
            manié avec précaution, il est trop généraliste ou démagogique… et 
            risque d’être confondu avec l’universalité, surtout concernant une 
            goutte d’eau comme Partycul System.
 Le 
              nom de la revue se résume à un pied de nez amusé ? A 
              peu près. C’est Pierre Desproges qui parlait de "polésie" 
              et cela a inspiré à Layo Le polème. "Polem" c’est aussi 
              "la guerre" en grec, et Athènes la fameuse patrie où l’on 
              pouvait être général et élu municipal. Alors pour dire que le combat 
              continue et plutôt que de m’appeler Che Ganacho, nous avons choisi 
              avec Layo de revêtir les fonctions de polémarques chefs de guerre, 
              qui étaient autrefois les grands archontes de la cité et ma foi 
              aujourd’hui de modestes citoyens, les gens sont devenus prudents !
 "Polème, 
              revue de polèsie" Y-avait-il pour toi nécessité de dédramatiser 
              le caractère solennel d’une frange de la poésie contemporaine ?Il 
              y aurait tant à dire…
 La 
              revue est-elle un clin d’œil au courant contemporain de la poésie, 
              depuis le mouvement Cobra en passant par les mouvances de la poésie 
              Action (Chopin, Heidsieck,  Pey…), ou êtes-vous plus largement influencés 
              par des mouvements artistiques et littéraires contemporains (Le 
              lettrisme, le Beat, Fluxus, l’arte povera…) ? Vous reconnaissez 
              vous une paternité à ses courants ? Dans quelle mesure ont-il 
              influencé votre démarche ? Pas 
              d’école, des coups de pioche où l’on peut. Tous ces courants (beat, 
              fluxus, arte povera, land art) ont plus ou moins une paternité dans 
              le sens où ils nous précèdent et qu’ils ont atteint une notoriété 
              qui s’étend par ramifications successives. Comme beaucoup de monde 
              (y compris les lettristes et les situationnistes qui en viennent 
              directement) nous avons grandit en connaissant le surréalisme, ET 
              PUIS DADA  (quand même !). Il y a aussi les phares plus 
              anciens comme Baudelaire ou Laforgue et les colonnes d’hercule de 
              l’écrit que sont les textes de Rimbaud. Le mouvement du Grand Jeu 
              (Gilbert-Lecomte & co) est pour nous une référence, au niveau 
              de la recherche aussi exigeante qu’évolutive que peut mener un groupe. 
              Et puis il y a des dizaines de personnalités solitaires ou plus 
              ou moins liées à des groupes, des mouvements historiques ou sociaux… 
              Le vingtième siècle regorge de poètes, Eluard est majeur ainsi que 
              Apollinaire, Prévert, Vian, Tzara, Maïakovski ou Breton, mais il 
              y en a tellement… !
 Le 
              format Pdf sur Cd-rom pour la promotion à quelque chose d’éminemment 
              esthétique et ludique. N’est-il pas, selon toi un support original 
              à la diffusion de la revue ?Nous n’avons utilisé ce support que pour une partie des envois 
              promos, pour économiser du port et surtout parce qu’on n’avait tiré 
              qu’à 350 numéros la revue sur support original. Mais au vu de la 
              plupart des réactions, je pense que c’est trop original. Pour ma 
              part, je trouve ça changeant de pouvoir véhiculer le contenu d’un 
              livre sur un CD;  notre rapport s’en trouve modifié et cela nous 
              rapproche d’un objet multimédia image-texte-son où certains vont 
              commencer à s’aventurer, en concevant un peu d’interactivité, et 
              s’adressant essentiellement à un visionnage/écoute par lecteur DVD 
              + écran télé (plus liés à la détente) et non plus sur des ordinateurs 
              de travail. Mais nous préférons pour l’instant garder à ce petit 
              objet (que je trouve esthétique) un rôle de complément au support 
              papier.
 Pas 
              exclusivement dédié à la littérature poétique, la revue accorde 
              une large tribune aux arts graphiques pris au sens large (Photos/dessin/ 
              graphisme) Y-a t’il un fil conducteur entre ses travaux au fil des 
              numéros, des thématiques particulières ? ou simplement l’expression 
              libre d’un collectif d’artistes ? Nous sélectionnons (Layo et moi) des gens dont nous apprécions le 
              travail en leur proposant de participer librement, et on choisit 
              selon ce qu’ils rendent ce qui apparaît dans le livre. Bien sûr 
              une large place est faite aux Partyculiers, dont certains sont aussi 
              dans des projets musicaux. Mais cela déborde, et nous marchons sur 
              le système des rencontres par réseau. Nous avons par exemple commandé 
              une histoire à base de capture d’images vidéo à Christophe Acker 
              (déjà présent sur le N° 7 de la première série en tant que dessinateur), 
              pour contraster la présence assez forte des photos. Nous avons eu 
              aussi envie d’un thème (Derrière les rideaux) en proposant à tout 
              le monde le choix de le travailler ou pas.
 
 Quels 
              poètes ont ta préférence ? Tu es davantage influencé par la 
              poésie classique, Latine, Russe, Anglo-saxonne, Française ?
 Je 
              n’ai aucune préférence de style. J’ai été bercé depuis toujours 
              par la poésie française, mais j’ai découvert des poètes anglo-saxons 
              depuis que l’on travaille sur Breezy Temple, une belle révélation.
 Selon 
              toi, en quoi résident la force et la puissance de la poésie ?Un 
            aphorisme emprunté à un auteur pour finir…La 
              poésie est source d’évocation. Elle n’explique pas, elle met en 
              résonance un monde sensible, intime, et qu’on ne soupçonne parfois 
              pas avant telle ou telle phrase… comme un éclair dans la nuit du 
              corps, c'est-à-dire que les phrases et les mots sont des giclées 
              de sens ou de non-sens, qui passent ou pas inaperçus parmi d’autres 
              fusées éclairantes. Puis ils nous taraudent sans cesse, nous bercent, 
              ou petit à petit refont surface pour finalement nous hanter.
 C’est 
              donc en premier lieu une rencontre, puis une force et une puissance 
              environnementale, pas plus ou pas moins que tel meuble, tel jardin 
              ou tel arbre (et dans lesquels chacun met du sens ou du sentiment).
 Fées, répandez partout
 La 
            rosée sacrée des champs.
 William 
            Shakespeare,  in Le songe d’une nuit 
            d’été (V, 1)
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