Préface de LEWIS. Le Lézard m'a dit qu'on pourrait prendre comme point de départ
la suite du Garage Hermétique, mais que le reste serait plutôt une discussion à bâtons rompus entre deux auteurs sur tout et sur rien, un peu comme pour l'entretien entre Forest et Tardi. J'ai bien rétorqué que Moebius ne devait pas connaître mon travail et que ça risquait plus de tourner à l'interview d'un auteur par un autre, mais le Lézard m'a assuré que le Maître avait déjà lu mes ouvrages. Après un léger frémissement rétroactif, j'ai dit que "bon d'accord, pourquoi pas, mais bon, allez ouais..."
En fait, dans ma tête j'avais deux questions assez précises.
[1] Qu'est ce que ça fait à Moebius quand des gens lui disent qu'il n 'a pas le droit
de faire la suite du Garage Hermétique, que c'est une oeuvre entière et unique ?
[2] Pourquoi cette suite est-elle coupée en deux dans une collection à 130 Francs, ce qui fera débourser à ses admirateurs la somme de 260 Francs pour lire la suite
du merveilleux Garage Hermétique ? En clair pour quoi a-t-il laissé faire ça et pourquoi laisse-t-il faire plein de choses odieuses autour de son oeuvre ou de son nom ?
Me voilà donc le jour du rendez-vous. C'est la grève. Je pars à 8h10 de la
porte de Vanves et j'arrive à 10h20 sur Belleville. Avec Joël du Lézard on
se pointe à la Galerie Stardom. Evidemment, Moeb est encore dans les
embouteillages. On va au café en face et on se fait un petit flipper en
attendant.
Quand Moebius arrive enfin, le suis en train de jouer en multi-balles,
j'ai des multiplicateurs, ça clignotte de partout, bref je me tâte une
demi-seconde pour savoir si je laisse tout tomber pour lui serrer la main
ou si je reste débile mental scotché au flipper. Finalement, je décide de
jouer à fond ma boule jusqu'au bout. Je continue a allumer plein de trucs,
Moeb arrive à côté de moi, et observe. Les secondes passent, puis ma boule
finit par se diriger en plein milieu de mes deux flips. Une seule solution
pour réussir ma fourchette, c'est le tout pour le tout. Au moment précis
où la boule arrive dans le trou, je file un coup de pied de côté à la
machine. je rattrape la balle in-extremis, la fourchette réussit, la balle
est sauvée, et le flipper tilte.
:
Hum...Ca c'est sûr, ça allait tilter.
:
Oui mais bon, c'est un risque à tenter, de toutes façons la balle était
perdue.
On échange deux ou trois amabilités.
:
J ai vu là les albums que tu as fait..
:
Ah oui ? Moi aussi j'ai vu vos albums...
Il me tutoie d'emblée, et moi je n'ose pas.
On s'installe, l'entretien commence.
:
On s'est déjà rencontré, non ?
:
La première fois que nous nous sommes vu, c'était à l'époque où A SUIVRE
spécial REVE venait de sortir et j'en ai profité pour vous offrir "Le
Cheval Blême" de David B.
:
Ah oui, je me souviens.
(Je n 'ose pas non plus lui dire que quand je lui ai précisé que c'était un album où David avait recueilli ses meilleurs cauchemars, il a fait la grimace en disant du bout des lèvres: Aaah... des cauchemars).
:
On a aussi failli travailler ensemble quand on a monté la revue
"Le Philographe", et ça n'a pas marché. je crois qu'on avait surtout
envie de rêver cette revue, mais pas de la réaliser. (rires)
:
Pourtant vous étiez à la base de ce projet ?
:
En fait c'était Jodorowsky. Mais j'ai été assez irresponsable dans cette
histoire. On souhaitait faire une belle revue, et y mettre des horreurs
àl'intérieur...
Mais pour faire des horreurs, il faut avoir des poussées de fièvre,
de fièvre horrifique, et être continuellement dans cet état ce n'est pas
possible. Dans des conversations entre copains, on peut faire de la
surenchère à la provocation mais une fois qu'on est seul devant sa table
à dessin, il faut être authentiquement provocateur pour le réussir.
:
Il faut avoir beaucoup d'assurance...
:
Ou de folie! C'est un peu une discussion que j'ai eue avec Franck Bruneau
au sujet de la folie. C'est dans la folie, dans l'art contemporain, que
l'on trouve les sources d'inspiration les plus constantes depuis un siècle.
Que ce soit Van Gogh, qui en est un peu le pape, ou Antonin Artaud, ou
ceux qui utilisent des substances, il n'y a plus que la folie qui permette
un peu de recul. Nous sommes contraints à la conscience rationnelle. D'où
que vienne ce choix, c'est par là que l'Humanité espère trouver sa voie, la
science, l'ordre, la loi, l'organisation forcenée du monde... Mais
peut-être est-ce là la folie ?...
En tout cas, les artistes, eux, ne peuvent pas se contenter de ça... Il y
a la nécessité du mystère... quelque soit le genre, quelque soit le
support. Dans ce cas, pourquoi pas la BD ?
En ce qui concerne le premier numéro de Philographe , le thème
fédérateur était la honte... Il fallait, soit raconter une histoire sur la
honte, soit se mettre soi-même dans une situation de honte... Je dois
dire que je me suis "honteusement" défilé en dessinant une de ces
histoires sans queue ni téte, typique du style Moebius... Au fond,
j'avais tenu le pari... J'ai vraiment honte d'avoir fait ça ... Mais
comment peut-on avoir honte d'avoir tenu un pari aussi délicat?...
Bon... On n'en sort pas !
Ceci dit, c'est vrai qu'il est difficile de transgresser l'esprit d'une
revue qui n existe pas encore.
Ce qu'il y avait de bien, à Pilote par exemple, c'est que le cadre était
assez bien déterminé, et depuis suffisamment longtemps, et que ça
permettait un certain confort dans la transgression.
:
C'est aussi pour cela que le projet n'a pas abouti. Tout étant tellement
permis, que rien n'a été possible. On peut parler du Garage Hermétique ?
:
Le Garage Hermétique est un bon exemple de tentative de folie contrôlée...
C'était à la limite, mais c'était contrôlé... Au-delà de cette limite,
je dérapais hors du contact avec le lecteur... C'est ça le problème de la
folie... Il ne faut quand méme pas oublier que la vraie folie, celle qui
est au-delà des limites, est un drame humain... C'est aussi une fonction
naturelle, le délire permet une certaine expression presque au-delà du
langage, mais aussi un appel au secours mais aussi une prison...
Non, il ne faut pas oublier ça, quand on utilise cette énergie... Il ne
faut pas oublier non plus que nous sommes des bateleurs, nous tentons
d'attirer la plus grande foule possible dans notre petit cirque personnel,
et nous sommes prêts à tout pour séduire les badauds, nous sommes prêts à
tout pour étre reconnus par notre "famille", il y va de notre survie...
Et qu'y a-t-il à l'intérieur du cirque ?... Nos besoins, nos désirs,
nos haines, nos amours, et tous nos tours de magie pour que ça soit
utile et intéressant...
Le tout est de savoir si on travaille avec ou sans filet... Il faut
survivre à la fin de chaque spectacle, quand même!
:
Mais il ne faut pas que cet endroit soit poussiéreux, ou que tout soit figé...
:
Non bien sûr. L'artiste est donc "heureusement" condamné à une gymnastique
insensée entre une expression "sincère" de sa folie et le maniement
cynique d'une procédure codée et technique...
Moi, je trouve que c'est ça qui est beau dans le théàtre ! Que ce soit par
le biais de l'instrumentation musicale, de la mise en image cinéma ou BD,
ou carrément sur un tréteau avec un texte de Moliére.
Oui, le Garage est un bon exemple de mariage entre folie et technique.
:
Et le fait d'en réaliser la suite, c'est le méme désir ?
:
C'est aussi le constat un peu amer qu'on ne peut pas reproduire deux
fois ce même miracle.
Dans le Garage Hermétique, ce n'est pas tant l'histoire qui compte que
la relation qui s'établit entre l'artiste et le lecteur dans le cadre
précis de la revue
"L'Homme du Ciguri" ne bénéficie pas d'un cadre relationnel aussi clair
(le Garage a demandé plus de deux années de parutions mensuelles, au
compte-gouttes, deux années sur le fil du rasoir !).
Tout au plus peut-il espérer paralyser l'écho lointain, maintenant vieux
d'une quinzaine d'années, et bien enkysté dans nos mémoires, presque
momifié...
Mais ça aussi, ça fait partie du travail du cirque (le théâtre, le cirque,
c'est kif-kif, si j'ose dire), un peu comme le coup des assiettes qu'on
fait tourner au bout d'un bâton.
J'ai l'impression, parfois, de faire une sorte de long "numéro", depuis
une trentaine d'années, devant un public patient et fidèle, persuadé qu'il
finira bien par sortir quelque chose de tout ça...
(Soit il finit par s'écraser définitivement, soit il s'envole dans l'azur
du ciel, soit... Rien d'autre qu'une gesticulation!)
:
Pour en revenir à la suite du Major, qu'est ce que vous pensez des gens
qui disent qu'il ne faut pas toucher au Garage Hermétique, c'est un
album merveilleux, et même Moebius n'a plus le droit d'y toucher ?
:
Ça prouve que le Garage est entré profondément dans l'inconscient de
certains... Mais comme je suis assez iconoclaste, j'aime bien secouer le
cocotier des images que j'ai pris tant de soin à monter... Quitte à
reverrouiller tout le truc, encore pire, mais avec cette fois la tête en
bas et le nez peint en vert.
:
Le message aussi ?
:
Je pensais à l'époque qu'il était plus sacrilège et plus amusant de
pratiquer une activité artistique délibérèment amputée de tout message
conscient... Pour moi, seule comptait l'énigme, la pure énigme, avec autant
de solutions différentes que de lecteurs.
Et puis il y a aussi une forme de timidité à me faire juge des travers de
mon temps qui porte vers une forme d'expression purement distractive...
Distractive, mais générée dans une sorte d'urgence existentielle, comme
s'il y allait d'une mystérieuse et improbable survie...
Une parodie de la gravité et du futile, renvoyés dos à dos... Une
simulation de la distraction qui prendrait du coup un caractère
dramatique authentique qui permettra éventuellement à notre souffrance
enfouie et à notre extase envolée de se reconnaître par résonance.
L'artiste est un des avatars les plus purs du chaman originel, celui qui
peignait Lascaut... C'est un voyant typique, avec une fonction
sociale multiniveaux...
Il n'y a pas d'école pour ça. C'est la planète, pour ne pas dire plus, qui
à travers l'Humanité, sécrète du "voyant" pour créer du sens à partir du
chaos, de la vérité à partir de la "réalité".
A l'heure actuelle, l'organisation-description de la réalité par
l'intelligence rationnelle est en train de prendre possession de nos
vies... jusque dans nos rêves... Bien que ce soit loin d'être joué au
niveau planétaire, le "lobby" du rationnel est d'un impérialisme
monstrueux... C'est le retour du veau d'or, mais bon... Pour nous,
le recours qui vient spontanément, la porte de sortie mais aussi l'outil
privilégié, c'est sa propre folie... Il n'y a plus que là qu'on puisse
aller...
:
Ou aller dans l'irrationnel des autres...
:
Mais on fait tout ça!... Tous les livres, tous les films, toutes les
oeuvres d'art sont le fruit d'un dérapage dans l'inconnu.
:
Vous vous étes posé beaucoup de questions avant de faire la suite du
Garage Hermétique ?
:
Pas trop, l'envie était présente depuis une dizaine d'années... j'avais
déjà écrit un scénario pour une suite du "Garage", appelé "La Otra" mais
j'ai pensé qu'un épisode intermédiaire méritait un album... Cette situation
bloquée aurait pu durer longtemps mais en 92, J.M. Lofficier me proposa
la publication de la suite du Garage dans "Cheval noir", une revue US de
BD "indépendante".
C'était tentant : une publication noir et blanc, dans le même rythme et la
même liberté qu'à l'époque de "Métal". J'acceptai et pu fournir deux ou
trois planches par mois pendant un an et demi à peu près... Et puis la
source se tarit pour des raisons pratiques et le projet ne se termina que
devant l'intérét des Humanos pour la soixantaine de planches déjà
réalisées...
:
Au début, ce n'est pas vous qui deviez le dessiner ?
:
Si, toujours!... Ça n'a rien àvoir avec des albums comme "Le Prince
impensable". Moi ce qui m'a déçu, c'est de ne trouver aucune prépublication
dans la presse pour "LHomme du Ciguri"... Parfois, je surestime le pouvoir
attractif de mon travail.
:
Vous ne considérez pas l'album classique comme un support ?
:
Si bien sûr, mais sa dimension relationnelle est faible... Le public est
loin dans l'espace !... Ça, c'est normal !... Mais il est également
secondaire. La vraie relation se fait bien sûr ailleurs!
:
Qu'en est-il de la cohabitation avec les éditeurs?
:
On travaille avec des P.M.E. A part le côté artistique de certains
intervenants, on est là devant le monde bien particulier du commerce avec
ses structures complexes, ses croyances, ses besoins, ses objectifs...
J'essaie de trouver avec mes éditeurs les interfaces qui permettent de
travailler à notre survie mutuelle.
:
Donc, ce n'est pas frustrant de se retrouver avec deux albums couleur au
lieu d'un seul pour la suite du Garage Hermétique.
:
Si !... Mais tu sais comment sont les interfaces en ce moment... (rires).
:
Ce n est pas de la nonchalance ?
:
Oui... je suis plutôt nonchalant dans la gestion de mes nécessités
vitales.
:
Je ne dis pas cela seulement pour vous... On finit par atteindre un stade
d'imbécile heureux presque.
:
Oui. Et c'est bien un paradoxe humain de voir que le signe le plus précieux
de notre liberté est ce que nous cherchons si férocement à éliminer
l'erreur ! Mais mon cher monsieur, si l'erreur n'existait pas, il faudrait
l'inventer, sinon c'en
serait fini de la révolution !... Et de l'évolution... Pourtant, autre
paradoxe, l'erreur n'existe pas, puisque nous créons ce monde dans la
perfection de l'inéluctable.
:
Vous n'avez pas peur d'être à un moment hors réalité ?
:
Si, bien Sûr... Mais en même temps, c'est un peu ma spécialité...
Jusqu'à maintenant, j'ai réussi à vivre plutôt bien on blessant un nombre
raisonnable de personnes, mais toujours sur la marge de dérapage, dans un
égoisme et une inconscience parfaitement maniaco-dépressive.
Le dessin, et plus précisément la BD, me permettent de compenser et ainsi
de survivre.
:
Et les conflits?
:
C'est comme l'erreur... Quelque part, ça n'existe pas... Le problême,
c'est d'arriver à localiser ce "quelque part" avec le maximum de célérité.
Malheureusement il est difficile de faire l'économie de la crise
émotionnelle, même si l'on est très rapide.
:
Pour on revenir à la suite du Garage, c'est quand même l'éditeur qui a
décidé tout seul. C'est son point de vue qui a été adopté... Vous avez
abdiqué...
:
Bien sûr que j'ai abdiqué... Mais seulement après m'être bien battu...
Et battu, non pas par une volonté plus forte que la mienne, mais par des
motivations typiques du code de survie des P.M.E. Ça ne se serait pas passé
ainsi si les Humanos avaient mis leur nez dans mon scénario ou mes dessins
de "L'Homme du Ciguri"...Quoique... même là, on peut discuter... Ça dépend
de quoi on discute et avec qui.
Là, on l'occurrence, il faut bien constater que l'album est sorti en
couleur et sur cinquante pages, alors que je le voulais on noir et blanc
et sur cent pages...
:
Pour preserver les Humanos ?
:
Oui , c'est une P.M.E...
:
Je suis d'accord, mais "Blueberry" se vend plus que "Le Garage", et quand
les deux sortent ensemble, et que l'un est deux fois plus cher que l'autre,
on se demande si vous faites un cadeau aux Humanos... Mais vous vous
coupez aussi d'une part du public.
:
J'aime bien me couper d'une part du public.
:
"L'Homme du Ciguri" est publié dans une collection où se trouvent De Crécy
et Bézian... En fait, les Humanos ont créé cette collection pour de bons
auteurs qui vendent peu, trois ou quatre mille exemplaires, pour un petit
public, et on se demande pourquoi "L'Homme du Ciguri" est publié dans
cette collection qui est chère, et réservée aux petits tirages.
:
Le Garage Hermétique est assez connu dans le petit monde de la BD, mais ce
n'est devenu un tirage acceptable qu'avec le temps... Je pense que Les
Humanos en ont tiré les leçons à tort ou a raison...
:
Mais pour la suite du Garage, il faudra payer deux fois 130 francs...
:
Oui, si j'ai placé mon album chez un éditeur qui a fait un mauvais calcul,
je serai moi-même victime de ce choix.
:
A la fin du Garage Hermétique, le Major se trouve dans le métro à Paris,
dans notre univers, et dans ce nouvel épisode il en sort complètement
ailleurs.
:
Non... En fait, il est bien à Paris... Je reconnais que c'est une vision
peu convaincante de notre belle capitale... A côté, le monde artificiel du
Garage paraît plus solide.
Curieusement, dans la suite du Ciguri, "La Otra", le monde retrouve un
temps sa cohérence mais c'est le Major lui-même qui revient incapable de
percevoir cette réalité.
:
Y a-t-il un parallèle entre Grubert et Blueberry ?
:
Bien sûr, Blueberry évolue dans une image de l'Ouest ainericain qui se veut
très réelle, qui est l'Ouest de Charlier, et qui représente comme une
métaphore du Garage Hermétique. Un monde clos, un univers Spatio-temporel
préservé, qui commence vers 1840, et qui se termine en 1900. Un territorre
qui va du Mississipi à la Californie, et du Mexique au Canada. C'est grand
pour un "homme qui marche" mais tout petit dans l'histoire du monde. Et on
prétend donner a cette petite bulle spatio-temporelle une valeur universelle.
Et cette universalite n'existe que si l'on reste dedans. Dès qu'on en
ressort, c'est fini, ça s'ecroule.
Si tu fais du Western, et qu'on commence à voir la mer. on va te dire
que tu dérapes...
Il faut bien rester entre cowboys... (rires)
Voilà donc une sorte de Garage Hermétique. Charlier qui en a les clés,
s'en est allé. et j'essaie de faire éclater tout cela, sans le transgresser
trop gravement. On ne peut s'échapper de cette voie de Garage par les côtés,
mais il reste le Dessus, et le Dessous. C'est l'intêrét de cette bulle.
On peut descendre a fond dans le mal, monter a fond dans le bien et
toujours rester dans le Western par exemple. C'est comme le canon d'un
fusil, un espace bien circonscrit, c'est le "gun".
L'entretien se termine. j'ai déjà compris que je n 'avais pas réussi à
poser les bonnes questions aux bons moments, que je n 'ai pas osé bousculer
Moebius dans ses contradictions, que je n 'ai pas saisi la moitié de ses
envolées ésotériques... En gros, j'ai compris que je n 'avais pas été à la
hauteur même si j'avais eu des semblants de réponses à mes questions de
base. Il me vient alors une ultime question.
:
Une dernière question. Tout a l'heure, quand vous etes arrivés, je jouais
au flipper. La boule descendait juste au milieu, j'allais perdre, j'etais
sûr de perdre, j'ai donné un petit coup de pied, j'ai fait une "fourchette"
et j'ai récupére la balle, j'etais sur de "tilter", et c'est ce qui s'est
passé. Qu'est ce que vous auriez fait a ma place ?
:
Oh, ça dépend de l'état d'esprit... Il y a des jours ou j'aurais mis un
coup de pied, d'autres pas. Il y a le jeune "flipperman", et le vieux
"flipperman". Aujourd'hui, le vieux "flipperman" aurait laissé filer la
balle...
Je m'en vais dans le froid en me demandant ce que fera le Lézard de cette
discussion à double sens uniques.
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