Jadeweb :
Il semblerait que vous ayez commencé très tôt
votre carrière dans le monde du spectacle...
Ted
V. Mikels : À l’âge de cinq ans j’exécutais
des tours de magie pour mes amis et mes voisins, et à 19
ans je suis véritablement devenu magicien. Je faisais un
show de deux heures et demie qui s’appelait Open sesame où
j’étais à la fois ventriloque, acrobate et accordéoniste
solo ! J’ai joué à travers tous les États-Unis
dans des night clubs, des théâtres, des églises...
À cette époque, je voulais à tout prix filmer
mon propre spectacle. Je l’ai fait, et c’est ainsi, qu’entre 1950
et 1958, je suis devenu cameraman et journaliste pour KGW TV, KOIN
TV, KWJJ TV... Toutes les stations de télé de Portland
en fait !
J’ai joué
et dirigé un nombre incalculable de pièces de théâtre
(The bat, The man in a dog suit...) dont The view
from the bridge pour laquelle j’ai reçu une récompense.
Je me suis aussi occupé de la réalisation de dizaines
de films éducatifs sur l’hygiène, la façon
de se comporter en société... Dans cette période,
j’ai même interprété des petits rôles
dans des productions plus importantes comme Indian fighter
avec Kirk Douglas.
Je jouais
un Indien sur un cheval qui tirait des flèches enflammées
sur un fort, ensuite j’étais un soldat qui, du haut du fort,
tirait sur cet Indien ! Puis, comme si cela ne suffisait pas,
je redevenais un Indien qui tractait un chariot en feu pour incendier
les tours du fort, à l’intérieur duquel j’étais
un colon qui balançait de l’eau sur ces tours pour éteindre
le feu que je venais de mettre en tant qu’Indien.
Voilà,
c’est à peu près tout en ce qui concerne la période
1950-1958 !
Et
votre premier film fut Strike me
deadly.
Oui,
c’était en 1959 et mes enfants continuent de penser que c’est
mon meilleur film ! J’ai vendu tout ce que je possédais
pour pouvoir le réaliser : ma maison, ma voiture, tout !
je l’ai écrit, dirigé, produit, monté, et ça
m’a pris quatre ans pour le finir et le distribuer. Il est interprété
par Gary Clarke (ndr : major spatial dans l’immonde Missile
to the moon, et jeune Frankenstein lobotomisé dans How
to make a monster) et Jeannine Riley (ndr : naine trisomique
dans Pettycoat junction). Beaucoup de gens adorent ce film,
sans doute à cause du noir et blanc et des scènes
d’action dans la forêt, avec les feux, le tueur psychopathe...
Puis j’ai réalisé un de mes premiers succès
The black klansman (ndr : également connu sous le
titre I cross the color line) que je n’ai distribué
qu’en 1965 par manque de moyens. C’est l’histoire d’un Noir qui
infiltre le Ku Klux Klan pour tenter de retrouver l’assassin de
sa fille. Un Mississippi burning des années 60 en
quelque sorte ! Le succès rencontré par le film
m’a permis de monter ma propre maison de production : Genini
Film Distributing.
En
1968, vous réalisez The Astro-zombies qui est l’un
de vos titres de gloire.
The
Astro-zombies fut ma première occasion d’écrire
un film de science fiction. En 1960, j’avais concocté une
histoire qui débutait par le plan d’une centrifugeuse tournant
à la vitesse de 5 G, avec un astronaute sanglé à
l’intérieur. Poussée à laquelle il est humainement
impossible de survivre. Le plan suivant montrait la machine à
l’arrêt, deux mains arrachaient la tête de la personne
attachée qui se révélait être un robot.
À la suite de cette idée, j’ai commencé à
sérieusement parler, avec le Département Défense
de l’U.S. Air Force, des futures possibilités de transplantation
d’organes. L’armée m’a permis d’assister aux premières
études sur les greffes cardio-vasculaires au Texas, mais
quoi qu’il en soit, je n’avais pas suffisamment d’argent pour filmer
ce projet et j’ai mis mon histoire au placard. J’en ai réécrit
une partie en la complétant avec une histoire d’espions et
de secrets militaires jalousement gardés...
Est-ce
à cette période que vous avez rencontré Wayne
Rogers, co-scénariste et producteur exécutif de The
Astro-zombies, qui deviendra par la suite acteur de la série
M.A.S.H. ?
Je
connaissais Wayne Rogers depuis une projection de Strike me deadly
à Hollywood où il m’avait avoué être
impressionné par mon travail.
Nous avons
d’abord réalisé deux films ensemble, puis en 1967,
j’ai suggéré que nous fassions The Astro-zombies.
Wayne aimait l’idée et nous avons élaboré un
scénario un peu plus léger que mon histoire originale.
Peu à peu, cela devint beaucoup plus amusant, presque kitsch !
Le reste fait
partie de l’histoire : j’ai écrit, produit, et dirigé
le film dans les treize mois qui ont suivi, je l’ai ensuite distribué
par le biais de ma propre compagnie.
Dans
The Astro-zombies, vous avez confié le rôle
du docteur De Marco à l’immense John Carradine, acteur à
l’impressionnante filmographie, des Dix commandements à
Billy the kid contre Dracula (et père de David Kung
fu Carradine !).
Diriger
John Carradine fut une grande joie. Il connaissait son texte à
la perfection, ne se trompait jamais, et n’avait jamais besoin de
plus d’une prise. Il restait assis sur sa chaise pendant que j’appelais
les autres acteurs. Il regardait l’équipe et les techniciens
se préparer, puis il interpellait gentiment telle ou telle
personne en lui disant : Excusez-moi monsieur, ne devrions-nous
pas arranger tel micro ou telle lumière.
Après
s’être assuré que plus rien ne dérangerait le
bon déroulement du plan, il se dirigeait vers sa place, puis
jouait son rôle. C’était un prince.
Comment
avez-vous connu Tura Satana, une de vos actrices fétiches,
et par ailleurs, mythique héroïne de Faster, pussycat !
Kill ! Kill ! de Russ Meyer ?
La
première fois que j’ai vu Tura, elle était danseuse
exotique au Sliver Slipper à Las Vegas en 1960. Je ne lui
ai réellement parlé que sept ans plus tard, au moment
où je l’ai faite tourner dans The Astro-zombies. Avant
The doll squad (1974) qui est le second long métrage
que j’ai fait avec elle, personne n’avait encore pensé à
faire un film avec un groupe de femmes travaillant pour le gouvernement
et se battant comme des hommes...
Le karaté
n’était pas encore à la mode et les films de Bruce
Lee n’étaient pas encore arrivés aux États-Unis.
Aucun des acteurs, à part Tura, ne connaissait les arts martiaux.
J’étais loin d’être un maître en kung-fu, mais
en tant que cascadeur/acrobate/réalisateur, j’aidais les
filles à se bâtir un look de combattantes et ce en
fonction des angles de caméra.
J’ai même
fait les cascades de certaines scènes et chaque fois sous
un nouveau déguisement !
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The doll squad, l'antichambre
trash au futur Charlie's angels
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The
doll squad a semble-t-il donné naissance à la série
Drôles de dames ?
Francine
York, une des actrices de The doll squad, a prêté
une copie du film à Universal pictures à l’attention
du producteur Aaron Spelling. Quatre ans après, celui-ci
sortait sur le petit écran la série Drôles
de dames. Comme dans The doll squad, une des héroïnes
se nommait Sabrina, mon sénateur était devenu Charlie,
et il communiquait avec les filles de la même manière
que dans mon film ! Lorsqu’on m’a demandé si je voulais
engager des poursuites judiciaires, j’ai refusé. je ne tenais
pas à rentrer dans des querelles sans fin, ni à intenter
un procès à qui que ce soit. C’est la vie...
Qu’est-ce
qui vous pousse à tout faire sur vos films ?
Le
fait de ne pouvoir payer quelqu’un pour ces jobs, me contraint à
tout faire moi-même ! Si vous attendez que quelqu’un
fasse le boulot à votre place, vous n’arriverez jamais à
faire ne serait-ce qu’un court métrage. Je travaille nuit
et jour, sept jour sur sept, et encore, j’ai du mal à payer
toutes mes factures ! De toute façon, trouver l’argent
nécessaire à la réalisation d’un film est la
clef de tout, et, croyez-moi, financer un tel projet n’est pas une
mince affaire, à moins d’avoir un oncle richissime !
Si je
monte et réalise mes films, c’est pour en avoir le contrôle
total. Tant que j’écrirai, produirai et réaliserai
aussi bien que n’importe quel autre réalisateur, je ne laisserai
personne toucher aux concepts originaux que j’ai mis sur pied pour
monter mes films. Je suis prêt à autant assumer les
échecs que les succès et je suis très, mais
alors très loin de prendre ma retraite. En réalité,
je n’ai pas l’impression d’avoir encore commencé ma carrière !
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[ Le
site de Ted V. Mikels ] [ la chronique
de Astro-zombies ]
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