Le chemin des trois places

Götting & Avril

 

le chemin des trois placeséditions Futuropolis
1989 ISBN 2-7376-2645-5



Les éditions Futuropolis n'existent (malheureusement) plus, mais ce livre se trouve encore dans beaucoup de librairies spécialisées.

"Entre ici et le studio de mon ami, il y a trois places qu'il faut traverser pour raccourcir le chemin. Je le divise donc en quatre portions sensiblement égales dont les extrémités sont représentées par les places en question. Vous comprenez ?"

Le Chemin des trois places est un petit bijou inconnu qui réjouira tous les flanneurs parisiens. C'est un album d'ambiance, un album élégant et sans accroc.

Deux amis, l'un photographe et l'autre couturier se retrouvent tous les jours pour déjeuner. Il ne se passe jamais grand chose, mais leurs habitudes sont bousculées le jour où Louis et son ami surnomé 'elvis' ne déjeunent pas ensemble : ce sera l'occasion de découvrir un square...
- "je ne l'avais jamais remarqué et pourtant je passe devant son entrée deux fois par jour"
... et dans ce square, une charmante jeune fille, Carole :
- "c'est parce qu'hier il n'y était pas. Et demain, quand vous repasserez, peut-être n'y sera-t-il plus"
Au dénouement, l'amour sans doute trouvé et l'amitié conservée : il suffira de changer de troquet.

On l'a compris, il n'y a pas vraiment d'histoire dans "le chemin des trois places" même si la séquence classique "ordre / chaos / ordre retrouvé" est bel et bien présente. Elle l'est en fait de manière si discrète et si débonnaire qu'on s'en apperçoit à peine. La lecture du "chemin des trois places" est un de ces plaisirs simples que le livre lui-même évoque : les amitiés sans complication, les trajets pédestres sans angoisse, le badinage sans conséquence...

Toute cette légèreté est servie avec art par le dessin de François Avril - un auteur trop rare - et par une impression en deux couleurs (noir et saumon).

Götting et Avril font partie d'une vague d'auteurs exceptionnels apparus dans le courant des années 80 : Dupuy et Berberian, Stanislas, Martiny et Petit-roulet. Publiés chez Futuropolis ou dans la revue PLG et pour un grand nombre anciens étudiants aux beaux-arts, ils ont apporté un grand bol d'air frais à la bande dessinée par leurs thèmes adultes et naturalistes.

Cet album a-t-il sa place dans une bédéthèque idéale ? Il ne soulèvera pas les foules, ne révolutionne rien, n'a pas vocation à changer le monde (au contraire, il montre un monde qui ne change jamais) et pour comble, il n'est pas bien épais et est plutôt difficile à trouver ! Pour réponse, je me contenterais de sifflotter en mettant mes mains dans mes poches.

JN.

jppeyraud.gif (13459 octets)Addendum (comme tout tombe à point), cette citation de Jean Philippe Peyraud, interviewé sur Du9 en novembre 98 :
Je sais pas pourquoi ce livre m'a énormément marqué, je trouvais que l'histoire n'avait rien à voir avec ce que j'avais lu avant J'avais entendu Loustal dire un jour qu'il ne se voyait pas en train de dessiner les aventures d'un petit adolescent avec un chien blanc, et je me suis dit que moi non plus. Même si tout petit je dessinais des cow-boys ou des trucs comme ça, je n'ai jamais eu envie de raconter ce genre d'histoires. Et ça a vraiment été la découverte de voir qu'on pouvait raconter des choses assez simples en bande dessinée, autre que de la science-fiction ou du western.
çi-contre : la couverture de Il pleut, un opus de Jean-philippe Peyraud (1999, La comédie Illustrée) tout à fait superbe, qui raconte cinq histoires d'amour.






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