Des lecteurs ont-ils acheté Le Journal d'un Loser seulement pour la beauté des dessins ? À propos de mon prochain album en collaboration, Une Année sans Printemps , ce que j'ai lu du script de Lionel Tran a teinté mon graphisme. J'ai vraiment été touché par l'émotion dégagée par ces textes et j'ai tenté de coller à ce sentiment ténu, au risque de décevoir ou décontenancer les lecteurs du Journal d'un Loser en leur proposant un dessin plus bancal et moins accrocheur, un dessin qui se rapproche un peu de ce que je fais quand je fais des études d'après nature. Quand je dessine d'après nature, je ne me dis pas : « fais un beau dessin » ; J'essaie de retranscrire ce qui se passe en face de moi, à un moment donné, avec toutes ses contradictions et sa beauté cachée (la beauté est souvent cachée. On ne nous apprend pas à regarder les choses...) Je pense que j'ai essayé de me mettre dans cet état quand j'ai travaillé sur Une Année sans Printemps . Trouver le ton juste ne se commande pas comme une pizza à domicile. II faut travailler, refaire la première page tant de fois qu'il le faudra et le résultat sera toujours en décalage par rapport à nos envies. À partir de là, il faut continuer, faire des choix (discutables, comme tous les choix) et tirer sur le fil pour voir ce qui vient au bout. Mais en définitive on ne choisit pas grand-chose. ; Les choses se font... Pour ma part, dès que je commence quelque chose d'une certaine manière, je me dis : Pourquoi ne pas faire le contraire ? Et je me sens alors comme un balancier en mouvement, qui n'atteint un état immobile qu'en position extrême et pour un très court moment, avant de repartir dans l'autre sens. Vous me direz : mais la vie, c'est ça... |