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BLACK
IS BLACK
En
1972, à la suite du succès de Sweet sweetback’s
baadassss song et, surtout, de Shaft, on est en pleine
vogue du film Blaxploitation et Samuel Z.Arkoff (producteur légendaire
de séries B à Z pour American International Pictures,
décédé récemment) a cette idée
géniale : si un noir avec une coupe afro, une veste
en cuir marron et des pantalons pattes-d’éléphant
peut être flic, pourquoi ne pourrait-il pas également
incarner d’autres personnages classiques du cinéma et, en
particulier, du Fantastique ? Une idée tellement géniale
que l’année suivante plus personne ne voulait en entendre
parler ! Il faut dire que Blacula, Blackenstein, Black
Caesar, Black Godfather passe encore, Black Gestapo, Black
Samouraï, Black Lolita (je n’invente rien !),
c’est déjà un peu limite, mais arrivé en 1976
à Dr Black et Mr Hyde, il était temps de mettre
le holà !
Toujours est-il que Blacula,
en plus d’être une curiosité, est une authentique réussite,
William Marshall est excellent dans le rôle titre (imaginez
Marvin Gaye avec une cape, des incisives pointues et des rouflaquettes
à la Mungo Jerry ! Je sais, c’est dur…), sa compagne
vampire, Vanetta Mc Gee, est ultra choupette et la bande-son
(Hues Corporation, plus tard reconverti dans le Philly Sound/Disco)
très correcte, surtout lors de la classique scène
de discothèque (visiblement obligatoire dans TOUS les films
tournés entre 1968 et 1973 ! Il y aurait un article
à écrire là-dessus…). Succès oblige,
il y eu une suite l’année suivante : Scream,
Blacula, scream, pas vu mais de mauvaise réputation (excellent
titre quand même !).
Tourné
dans la foulée, Blackenstein possède
les mêmes ingrédients mais la sauce, ici, ne prend
pas, le monstre est lamentable et ne récolterait pas
le moindre bonbon un soir d’Halloween et le savant fou se perd dans
des expériences sans intérêt au lieu de se concentrer
sur la seule qui vaille la peine : mettre le cerveau de Nina
Simone dans la tête de Lauryn Hill, puis la greffer sur le
corps de Naomi Campbell ! C’est toutefois assez réjouissant
bien que totalement inepte (et vice versa). Deux bon points en tous
cas : être allé chercher le responsable des effets
spéciaux de la version originale de 1931 avec Boris Karloff
(mais même lui ne peut guère faire de miracles avec
des faux membres en plastique, de la sauce tomate et des costumes
récupérés chez Starsky et Hutch…) et, surtout,
avoir confié un rôle à une de mes idoles :
l’extraordinaire Liz Renay ! Véritable bombe sexuelle,
sept mariages, quelques années de prison (pour avoir refusé
de témoigner contre un de ses maris, mafioso), actrice (en
particulier dans Desperate living de John Waters – c’est
pour elle que Susan Lowe se fait greffer un pénis qu’elle
se fait enlever quand elle réalise qu’en fait, celle-ci la
préférait sans ! – et dans l’excellent Thrill killers
de Ray Dennis Steckler), écrivain (pour promouvoir ses mémoires,
finement titrées Prenez moi comme je suis, elle descendit
Hollywood Boulevard en courant totalement nue, à quarante-sept
ans !) et enfin strip-teaseuse renommée : ayant
atteint la cinquantaine elle fit un come-back retentissant avec
un spectacle de double effeuillage familiale avec sa fille !
Ces
braves Blacula et Blackenstein n’ont malheureusement
guère profité du revival funky 70’s, on a plus réédité
les B.O que les films eux-mêmes et le fade Jackie Brown
de Tarantino n’a pas apporté grand chose au genre (si ce
n’est de permettre de vérifier que, vingt-cinq ans après
Black mama , white mama, Pam Grier n’a rien perdu de
son charme…) ce qui ne nous a pas empéché de ressortir
du placard le blouson à la Serpico, le T-shirt " Kung
fu fighting ", le pendentif dent de requin et les Ray Bans
fumées, de laisser pousser le col de la chemise jusqu’à
l’épaule et de peindre une bande rouge sur le côté
de la Ford Taunus, de boire du Tang à l’orange en écoutant
Hell up in Harlem, les basses à fond !
Memphis Shock
EPOUVANTE
SUR BLACKTOWN
Lancée
sur le marché pour attirer la communauté noire américaine
dans les salles de cinéma et se remplir gaiement les poches
de dollars tout vert, la Blaxploitation se crée rapidement
ses propres lois. Le public black se découvre alors de nouveaux
héros : Shaft, Superfly, Foxy Brown, Cleopatra Jones
et quelques autres tueurs de vilains dealers blancs. Mais au milieu
de tous ces films d’action pétaradant, une chose étrange
apparaît : la Blaxploitation d’horreur…
En 1972, la
firme AIP met en chantier une adaptation black du roman de Bram
Stoker, Dracula. Le résultat ne se fait pas attendre
et Blacula obtient un joli petit succès en salles.
C’est ainsi que l’année suivante débarque l’inévitable
séquelle Scream Blacula Scream une inepte suite dans
laquelle le comte Blacula, entouré d’une cour de vampires,
devra se battre contre une prêtresse vaudou. Tourné
par Robert Kelljan, réalisateur/acteur de bas étage
et déjà responsable de deux sous-merde sexo-vampiriques
(Count Yorga et The return of Count Yorga), l’intérêt
de ce second épisode de Blacula réside plutôt
dans les pantalons pattes d’eph’ et autres manteaux orange en véritable
peau de yack portés par les protagonistes.
Il
était inévitable qu’après Blacula naisse
Blackenstein en 1973 ! Rarement jeu d’acteur n’aura été
plus catastrophique que dans ce film où la créature
déchire obstinément le chemisier de ses victimes avant
de leur briser les os. Fortement amusant donc. On ne s’attardera
pas trop sur Ganja and Hess (1973), aussi connu sous de nombreux
titres dont Double possession ou encore Black vampire,
une sombre histoire de vampire africain vivant à New York
baigné de musique soul, pour en arriver à Abby
(1974), décalquage approximatif de L’exorciste. Et
c’est l’acteur William Marshall, déjà deux fois Blacula,
qui s’y colle en interprétant le rôle d’un exorciste
qui essaye de sauver Abby (Carol Speed) des griffes d’un méchant
démon nigérien. Mutation, vol stationnaire au-dessus
du lit, morve gluante et gros vomis dégueus sont au programme
de cette sympathique production peu inspirée. Bien moins
inspirée en tout cas que Sugar Hill (1974), dans lequel
le héros (Sugar hill, donc) passe un contrat avec le vaudouesque
Baron Samedi, histoire de se débarrasser d’un cruel mafioso
tueur grâce à une armée de zombies haïtiens,
tranchant tout ce qui bouge à grands coups de machettes !
On en frissonne presque.
On signalera pour les cinéphiles pervers un mystérieux
The house en skull mountain (1974) pour en venir à
Docteur Black & Mister White (1975). Bien évidemment,
le bon docteur faisant des expériences sur la régénération
des cellules, décide d’expérimenter ses travaux sur
lui-même plutôt que sur des cochons d’Inde (les amis
des animaux apprécieront le geste) et se transforme en… blanc !
Ou plutôt en noir enfariné qui devient méchant,
zigouille à tour de bras et se maque avec une prostituée.
Petey Wheatstraw : the devil son-in-law (1997) se trouve
être encore plus drôle, puisque c’est le comédien
Rudy Ray Moore, trublion vulgaire et rentre-dedans de café-théâtre
américain, qui passe un pacte avec le diable, se tape une
chambre entière remplie de donzelles, kung-fu fighte avec
allégresse sur du disco et sort des blagues archi-salées
au milieu de diablotins habillés de slips kangourous en skaï
rouge ! On en finira avec les années 70 avec Abar,
the first black superman (1978) ou un noir devient une sorte
d’homme qui valait 3 milliards à cause de la potion du Docteur
Zippy, un nain blanc qui ne connaît pas son texte et se contente
de danser avec des blondes à poil.
Les années 80 se font tristes avec seulement un Black
devil doll from hell (1984) contant les tueries d’une poupée
maudite et ce n’est qu’en 1996 que la firme Troma nous assène
un confus mais drôle Bugged qui mélange absurdement
insectes géants cannibales, top-models blacks aguichantes
et déchets toxiques… À quand la suite ?
Pierre-Henri
de Castel Pouille
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